Des adhésions décisives à la nouvelle version de Libra
18 mai 2020 - 08:55
Temps de lecture : 3 minutes
Par Nathalie E.
L’association Libra de Facebook vient d’enregistrer plusieurs adhésions. Elle compte désormais trois nouveaux membres dont l’un des plus gros fonds souverains de la planète, Temasek.
Une nouvelle vague de partenaires
La mouture revisitée du projet Libra attire de nouvelles forces vives. L’association vient d’enregistrer trois adhésions annoncées par Dante Disparte, son vice-président.
« L’ajout de trois nouveaux membres à la Libra association montre notre engagement à bâtir un groupe diversifié d’organisations qui contribueront à la gouvernance, à la feuille de route technologique et au lancement de la préparation du système de paiement Libra. »
Les sociétés californiennes de capital risque Slow Ventures et Paradigm ont ouvert le bal. Cette dernière a été co-fondée par l’un des fondateurs de Coinbase, Fred Ehrsam, qui a déclaré que c’était la capacité de Facebook à propulser la cryptomonnaie vers une adoption de masse qui l’avait poussé à adhérer. Mais la grande nouvelle, c’est l’implication de la puissante holding singapourienne, Temasek. Gérant un portefeuille estimé à 375 milliards de dollars d’actifs, la situant au 8ème rang mondial, elle couvre un large éventail de domaines allant des services financiers aux télécommunications, en passant par les medias et la blockchain. De fait, elle devient l’un des plus importants bailleurs de fonds de Libra dont la gouvernance compte désormais 30% de sociétés financières. Son directeur général adjoint, Chia Song Hwee, témoigne de son enthousiasme.
Notre participation à la Libra Association en tant que membre nous permettra de contribuer à un réseau mondial réglementé pour des paiements de détail rentables. De nombreux développements dans l’espace nous excitent. Nous sommes impatients d’explorer davantage le potentiel de la technologie.
Un tournant majeur ?
Pour un projet considéré comme presque moribond suite à la défection de géants comme Paypal, Visa et Mastercard, c’est un vrai retournement de situation. Inquiets face à la levée de boucliers suscitée par la perspective d’un stablecoin Facebook, ils avaient préféré plier bagages. Mais depuis, Libra a ripoliné ses intentions pour plaire aux régulateurs.
Dans sa nouvelle version, elle est devenue « une monnaie à devises multiples » qui inclut des Libra à « devise unique », comme la LibraEUR, utilisée en zone Euro, la LibraUSD, pour le dollar américain. Le dollar singapourien figure aussi comme l’une des monnaies fiat ayant son propre stablecoin sur le réseau. Ce choix quelque peu surprenant anticipait peut-être la collaboration avec Temasec et la vocation du projet à s’ouvrir davantage au marché asiatique.
Quoi qu’il en soit, cette souplesse dans la conception de la monnaie de Facebook est susceptible d’apaiser les tensions réglementaires soulevées par l’initiative originelle qui misait sur une cryptomonnaie « universelle » adossée à un panier de devises. Le projet est donc redevenu plus fréquentable. Il y a peu ce sont la société de paiement en ligne Checkout.com et l’organisation caritative Heifer qui ont rejoint le consortium.
Au total, à ce jour, 27 organisations soutiennent l’ambition revisitée de Zuckerberg.
Une restructuration au nom de la conformité
Tout à son affaire de faire peau neuve et de montrer patte blanche, la fondation Libra, basée en Suisse, vient aussi de choisir son premier PDG qui prendra ses fonctions dans le courant de l’été. Stuart Levey, expert en réglementation, ancien sous-secrétaire du Trésor américain sous les administrations Bush et Obama, se chargera notamment d’obtenir des licences bancaires. Autant dire qu’il sera LA caution aux yeux des régulateurs.
Il n’y aura pas de feuilleton Libra à la sauce Telegram. Les deux projets concurrents ont adopté une stratégie diamétralement opposée. Dans son interminable lutte contre le gendarme boursier américain, la forte tête Pavel durov vient de rendre les armes. Sa blockchain Ton et son token Gram se sont finalement fracassés contre les hauts murs de la SEC. Libra elle, en prenant le parti de composer avec les instances régulatrices a certes beaucoup modifié son intention première mais s’est assurée un avenir.
Il est de plus en plus probable que sa bonne volonté sera récompensée moyennant des mises à jour qui ressemblent à des mises à mort d’un objectif qui visait l’inclusion financière d’1,7 milliard de personnes. Avec des contrôles et des verrouillages à tous les niveaux pour se conformer aux normes du GAFI, Libra va devenir un énième système de paiement avec une puissance de frappe décuplée pour les populations déjà nanties. Pour les autres, il reste l’incensurable Bitcoin ouvert à tous, n’importe où dans le monde.
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