Les sociétés crypto établies dans les paradis fiscaux au coeur des derniers débats MiCA
11 mai 2022 - 10:59
Temps de lecture : 2 minutes
Par Nathalie E.
Le fameux projet de règlement MiCA destiné à établir un cadre juridique harmonisé pour les actifs numériques entre tous les pays membres de l’Union Européenne continue de faire des vagues . Dernier sujet de dissension : la proposition de fermer le marché aux fournisseurs de services crypto établis dans des paradis fiscaux. Problème : aucune interdiction de ce genre n’existe pour d’autres secteurs d’activité.
Une interdiction « deux poids, deux mesures »
Les députés parlementaires qui s’intéressent à l’encadrement des crypto-actifs au sein de l’UE, n’hésitent pas à transiger sur le principe d’équité dans leur volonté de contrôle. On l’a observé sur le projet MiCA comme celui sur les transferts de fonds. Dernier exemple en date, la proposition d’interdire l’accès au marché européen aux fournisseurs de services crypto basés dans des juridictions mises à l’index pour soupçon de blanchiment d’argent et d’évasion fiscale. Une liste noire, révisée deux fois par an qui, soit dit en passant est sujette à caution, l’Europe rechignant à balayer devant sa porte.
Mais la proposition risque de passer à la trappe, la Commission en charge du dossier adressant une mise en garde, relayée par Coindesk, assez ferme contre une telle mesure. A l’appui de son opposition, une observation de bon sens reposant sur un traitement inéquitable des crypto-actifs.
Ainsi pour elle, « aucune interdiction de ce type n’existe dans les autres législations sectorielles ». Par conséquent, l’adoption de cette disposition « pourrait contrevenir aux règles du commerce international ».
Une telle interdiction … pourrait créer des obstacles à la fourniture de services dans l’UE. Elle pourrait donc constituer une violation des engagements internationaux pris avec l’Organisation mondiale du commerce.
Document « no-paper » de la Commission
MiCA n’est que le début d’une course d’obstacles pour les acteurs crypto
La Commission émet donc de sérieux doutes quant à « la faisabilité et à la proportionnalité » d’une liste noire des prestataires de services sur actifs numériques. En effet, elle considère que cette proposition d’interdiction a davantage sa place dans le cadre des lois spécifiques au blanchiment d’argent (le règlement AML) qui régentent les secteurs bancaires et juridiques, et pas seulement celui de la crypto. Notons cependant que le document produit par la Commission ne représente pas la vision de l’institution, c’est une version « non-paper » qui peut être retoquée. D’ailleurs les partisans de l’interdiction ne désarment pas. Ils ont porté l’affaire jusqu’à l’ESMA, l’organisme de surveillance du marché des valeurs mobilières de l’UE.
Le projet MiCA devrait être adopté avant l’été. La France, qui préside l’UE, se montrerait pressée d’en finir. De fait, le trilogue, dernière phase de la procédure qui réunit le parlement, la Commission et le Conseil de l’UE pour délivrer le verdict quant à la version réglementaire finale, devrait connaître une grosse accélération. Mais en admettant qu’il en soit ainsi, tout ne sera pas réglé pour autant. De nombreuses questions seront à résoudre. Rien que sur le territoire français qui bénéficie déjà d’un encadrement assez précis des acteurs du marché avec l’enregistrement PSAN, l’interrogation demeure. Déjà autorisés à l’échelle nationale, que devront-ils faire de plus pour se mettre en conformité ? Vraisemblablement beaucoup. Le course d’obstacles ne fait que commencer.
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