Panorama CBDC 2020 : au coeur du cyclone

29 décembre 2020 - 14:54

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Après avoir évoqué différentes raisons pour lesquelles les Etats veulent adopter une CBDC, notamment pour rompre leur lien de dépendance avec le dollar américain, on va s’attarder sur le contraste entre pays riches et pays dit émergents. Un contraste d’autant plus saisissant que les premiers, du moins certains d’entre eux, sont loin d’aborder cette histoire de monnaie numérique avec enthousiasme. Ils n’y voient en effet aucun caractère d’urgence. A l’opposé de pays plus fragiles à la pointe de la numérisation de leurs devises en raison de difficultés économiques mais aussi d’une configuration géographique et climatique spécifique.

La valse des nantis

Ne pouvant faire exception dans le concert des grandes et des petites nations qui veulent toutes, à plus ou moins long terme, leurs CBDCs, certaines zones comme la Nouvelle-Zélande ou le Canada continuent de tourner autour sans exprimer une volonté de vraiment y succomber. Ce dernier dispose d’ailleurs déjà d’un prototype « clé en main » pour parer à deux types d’éventualités. Dans le cas où sa population se détournerait complètement du cash physique ou si une Libra ou un autre stablecoin privé devenaient populaires auprès des citoyens. Pour le moment,  néanmoins la banque centrale canadienne reste convaincue de la prééminence de l’argent fiduciaire d’où l’impression massive de nouveaux billets de 5 $ canadiens.

De même, si la Nouvelle-Zélande s’est pliée à l’exercice désormais incontournable d’un futur soupesé à l’aune d’une monnaie numérique d’Etat, elle reste circonspecte notamment quant à la capacité d’une CBDC à égaler le cash en matière de confidentialité, de règlement instantané et d’autonomie dans le domaine de l’épargne et du paiement.

La CBDC, un modèle pour pays émergents

En fait, ce que l’on observe c’est que ces fameuses monnaies numérique d’Etat sont plutôt adaptées à un profil d’économies dites émergentes. Elles viennent alors combler un besoin criant de stabilité. Ce n’est pas pour rien en effet si c’est l’archipel des Bahamas qui a joué le rôle de pionnier cette année en émettant son dollar des sables (« Sand dollar »). La nécessité y est plus lisible et se fait pour tout dire plus impérieuse. En effet, le souci est d’arriver à homogénéiser une économie de paiements fragmentée, dominée par une forte utilisation des espèces et par une population largement sous-bancarisée. Des caractéristiques qui constitue un frein majeur au développement du pays. Aussi, il s’agit d’oeuvrer pour favoriser l’inclusion financière des individus en leur permettant d’accéder directement à un portefeuille électronique. Une solution facilitée par  un usage très populaire des smartphones (de l’ordre de 93% aux Bahamas).

La CBDC adaptée aux nations insulaires

Mais outre l’aspect purement économique, les Bahamas répondent à une configuration géographique type favorable à l’adoption d’une CBDC. En effet, les territoires insulaires constellés de multiples îles représenteraient en quelque sorte pour la BRI (Banque des règlements internationaux) le profil idéal pour faire vivre un tel modèle. D’abord, parce qu’ils connaissent de grosse difficultés dans l’acheminement du cash du fait du morcellement de leurs terres. Ensuite, parce que les difficultés sont d’autant plus accrues quand ce sont des zones exposées à des manifestations climatiques extrêmes. La CBDC bahaméenne permet de toucher les populations les plus isolées et de les intégrer plus facilement à la vie économique nationale tout en leur offrant une solution sécurisée.

Un avantage qui n’a pas échappé au Japon, archipel aussi soumis à des catastrophes naturelles récurrentes. Ainsi, la Banque centrale japonaise a publié au cours de l’année un document développant une approche spécifique liée à son contexte singulier. Une feuille de route assez précise qui met l’accent sur la résilience d’une monnaie numérique dans un environnement perturbé. Elle creuse notamment la possibilité d’une disponibilité hors ligne d’une CBDC.

Eviter la paralysie de l’économie pour raison climatique, voilà sans doute un des grands enjeux du XXIème siècle. Les Bahamas montrent la voie, d’autres assurément vont suivre, édifiés par l’expérience du pionnier.

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