Fan du cash, le Japon va expérimenter la méthode douce pour l’émission de yens numériques

23 novembre 2020 - 18:46

Temps de lecture : 2 minutes

Dès l’année prochaine, plus de 30 grandes entreprises japonaises vont commencer à expérimenter l’émission d’une monnaie numérique commune et privée afin de promouvoir la numérisation des paiements.

Un yen numérique à discrétion

Cette initiative d’un yen numérique prend corps dans la volonté déployée par le nouveau Premier ministre japonais, Yoshihide Suga, pour promouvoir la numérisation et la réforme administrative afin de stimuler la compétitivité de l’archipel. Elle fait aussi partie d’un plan plus vaste annoncé précédemment par la Banque centrale du Japon (BoJ). Celui d’une CBDC qui, comme dans nombre de pays, est censée s’intégrer au paysage monétaire national et servir aussi aux paiements transfrontaliers.

Mais en raison d’une singularité toute nippone – un usage du cash parmi les plus élevés de la planète – les choses vont se faire un peu différemment.

En effet, il ne s’agit pas de contraindre les citoyens mais de les amener progressivement vers de nouveaux comportements. Aussi, est-ce la méthode douce qui a été adoptée. La Banque centrale n’y jouera qu’un rôle d’observatrice tandis que trente acteurs économiques réunis en consortium vont émettre une monnaie numérique qui utilisera une plateforme de règlement commune.

Le but est d’améliorer le paysage numérique du Japon, où une myriade de petites plateformes dans un marché fracturé ne peuvent pas communiquer entre elles. En effet, en dépit d’un environnement ultra-tech, le Japon, pour des raisons historiques et culturelles, se situe en queue de peloton en matière de technologie financière. La résistance au règlement sans numéraire est très forte et ne correspond qu’à 20% des paiements. Un taux très bas sans commune mesure, de l’ordre de 70%, avec celui de la Chine.

Une modernisation nécessaire mais très progressive

Aussi la modernisation des infrastructures de paiement n’a pas été la priorité des gouvernements successifs. Le dernier en date se retrouve de fait face à un système désuet et fragmenté qui ne répond plus aux exigences de l’époque.

Le Japon possède de nombreuses plateformes numériques, dont aucune n’est assez grande pour battre les paiements en espèces. Nous ne voulons pas créer une autre plateforme de type silo. Ce que nous voulons faire, c’est créer un cadre qui puisse rendre différentes plateformes mutuellement compatibles. »

Hiromi Yamaoka, ancien cadre de la BoJ

Le modèle visé c’est un peu l’Alipay ou le WeChat Pay chinois ou les plateformes de paiement Visa ou Mastercard utilisées majoritairement par des Américains, pourtant eux aussi friands de billets et d’espèces sonnantes et trébuchantes (45% de règlements sans numéraire). Selon Reuters, les trois mégabanques japonaises – Mitsubishi UFJ Financial Group Inc, Mizuho Financial Group Inc et Sumitomo Mitsui Financial Group Inc – ont chacune déployé leurs propres systèmes de paiement numérique mais sans réussir à rallier l’adhésion des Japonais.

L’ombre du grand voisin chinois tout prêt d’émettre son yuan numérique ajoute, bien entendu, un caractère d’urgence à cet engagement vers la numérisation des paiements. L’ambition cependant reste modeste. Les autorités cherchent, pour le moment, juste à doubler le ratio des transactions numériques, en le faisant passer du 20% actuel à 40% à l’horizon 2025.

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