L’ONU veut freiner l’essor de la crypto dans les pays en développement
12 août 2022 - 18:33
Temps de lecture : 4 minutes
Par Nathalie E.
La Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (UNCTD) a proposé une série de recommandations pour freiner le rythme de l’adoption de la cryptographie dans les pays en développement. A travers trois notes d’orientation, l’organisation internationale met l’accent sur les risques, coûts et menaces que les cryptomonnaies font peser sur la stabilité financière, la mobilisation des ressources nationales et la sécurité des systèmes monétaires.
Les cryptos : une tendance délétère !
Créée au lendemain de la seconde guerre mondiale, l’organisation des Nations unies (ONU), selon sa charte, est destinée « à maintenir la paix et la sécurité internationales, et à réaliser la coopération internationale afin de résoudre les problèmes d’ordres économique, social, intellectuel ou humanitaire… Tout devant concourir au respect des Droits de l’homme et des libertés fondamentales. »
A ce titre, l’une des missions de l’ONU est de sensibiliser aux dérives délétères de l’époque et, de son point de vue, l’adoption croissante des cryptomonnaies dans les pays en voie de développement en est une.
Bien que les monnaies numériques privées aient enrichi certains individus et institutions, elles constituent un actif financier instable pouvant entraîner des risques et des coûts sociaux.
Note d’orientation de l’UNCTD
Ainsi dans ce qu’il faut bien appeler un réquisitoire en trois volets, l’instance internationale dresse un tableau plutôt sombre de l’essor grandissant des cryptos.
Les récents chocs subis par les devises numériques sur les marchés suggèrent qu’il est risqué de détenir des cryptomonnaies. Si une banque centrale intervient pour protéger leur stabilité financière, le problème devient alors public.
Note d’orientation de l’UNCTD
Evoquant rapidement leurs aspects positifs – leur efficacité dans les transferts de fonds et leur possible dimension protectrice contre l’inflation monétaire – l’agence onusienne se concentre bien plutôt sur les dangers de leur utilisation exponentielle depuis la pandémie de Covid-19, observant à cet égard que ce sont les économies émergentes qui ont témoigné de l’intérêt le plus vif pour des actifs leur permettant d’échapper en partie à la déroute d’un système défaillant.
« Tout ce qui brille n’est pas de l’or »
Pour contrer cette expansion, l’organisation a des tas d’idées, et sa première note d’orientation intitulée « Tout ce qui brille n’est pas de l’or : le coût élevé de la non-régulation des crypto-monnaies » donne le ton.
L’objectif étant de rendre les cryptomonnaies moins attrayantes, il s’agit d’en limiter la propagation en imposant une réglementation stricte pleine de taxes et d’interdictions en tout genre. Interdiction pour les institutions financières réglementées d’en détenir (y compris des stablecoins), d’en proposer des produits connexes et de les conserver pour le compte de leurs clients. Surveillance accrue des plateformes d’échange et des portefeuilles numériques et restriction drastique de la publicité liée aux cryptos. De plus, pour tenir compte des caractéristiques décentralisées, sans frontières et pseudonymes des cryptomonnaies, l’ONU invite à borner les points d’entrée centralisée de la Finance décentralisée (DeFi). Le but étant de reprendre la main sur le contrôle des capitaux face à des actifs qui de son point de vue, développé dans le deuxième volet, facilitent l’évasion fiscale et les flux illicites, pénalisant ainsi des économies déjà fragiles.
Si les cryptomonnaies peuvent faciliter les envois de fonds, elles peuvent également permettre l’évasion, et l’évasion fiscales par le biais de flux illicites, comme si elles se dirigeaient vers un paradis fiscal où la propriété n’est pas facilement identifiable.
Note d’orientation de l’UNCTD
De fait, à l’instar d’un nombre croissant de régulateurs, elle recommande un effort mondial coordonné entre les autorités compétentes pour mettre en œuvre des lois fiscales appropriées pour l’industrie crypto. Une concertation internationale valant également pour la réglementation et le partage d’informations.
Et au diapason du Fonds Monétaire International (FMI), l’organisation prêche également pour le développement de monnaies numériques de Banques centrales, censées se substituer avantageusement à Bitcoin et consorts.
S les cryptomonnaies continuent à se développer comme moyen de paiement, voire à remplacer officieusement les monnaies nationales, c’est la “souveraineté monétaire” des pays qui pourrait être mise en péril. (…) Un système de paiement numérique national de service public devrait répondre à au moins certaines des raisons de l’utilisation des cryptomonnaies et limiter l’expansion des crypto-monnaies dans les pays en développement.
Note d’orientation de l’UNCTD
L’ONU se soumet à la doxa ambiante
Le réquisitoire de l’agence onusienne à l’encontre des cryptos est bien dans le moove ambiant. Il n’énonce et annonce rien de bien nouveau, se contentant de reprendre les questions et débats, certes complexes et essentiels, qui agitent le monde de la régulation depuis qu’elles ont gagné en popularité. Face à un phénomène dont l’ampleur menace l’ordre financier traditionnel, les gardiens du temple font logiquement feu de tout bois.
Mais l’ONU elle, est censée être un peu plus du côté des peuples. Aussi, peut-on s’étonner du fait qu’elle évacue le comment et le pourquoi de cet engouement pour la crypto dans les pays émergents.
Il est vraiment étonnant de voir comment la conférence des Nations Unies ne reconnaît même pas (sans parler de l’effet de levier) les énormes avantages humanitaires et financiers que la crypto apporte à ces économies et sous-tend la demande massive évidente
Patrick Hansen sur Twitter
Dans les contrées où les monnaies sont soutenues par des institutions solides ou réputées comme telles, et inspirent un taux de confiance presque absolu de la population, leur nécessité ne s’impose pas. En revanche, dans des pays aux infrastructures monétaires plus faibles, les cryptomonnaies peuvent apparaître comme un recours. Elles contribuent également à l’inclusion financière des personnes non bancarisées, dont le nombre est estimé à 1,7 milliards d’individus à l’échelle planétaire. Deux aspects positifs parmi tant d’autres que l’ONU ne peut pas ignorer, mais qu’elle passe étonnamment sous silence, faisant perdre toute crédibilité à sa démarche. Répression et infantilisation des populations, on croirait entendre un banquier central.
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