Les bulles financières – De la Tulipomanie au Bitcoin en passant par la Bulle Internet

11 décembre 2018 - 09:03

Temps de lecture : 11 minutes

Par Julie P.

Le terme de bulle financière a toujours su marquer l’imaginaire. Il est défini comme « une hausse excessive et artificielle du prix d’un actif ou d’un ensemble d’actifs sur un marché ».

Bulles spéculatives – Les étapes classiques

Souvent associée à un comportement frénétique et irrationnel de la part des investisseurs, une bulle financière est néanmoins difficilement identifiable au moment où elle survient.

Dans le but de vous éclairer sur ce phénomène récurrent, nous avons dressé un portrait de différents événements se rapprochant de ce concept. Nous allons revenir sur la crise des tulipes, le krach boursier de 1929, le Dotcom Bubble et enfin, les différentes bulles du Bitcoin et des cryptomonnaies.

La crise des tulipes

Bulles financières : de la tulipomanie au Bitcoin ? Image de tulipes.

La crise des tulipes est la première bulle financière recensée par les historiens. Source de l’image : Pixabay

Les experts s’entendent généralement pour dire que la crise des tulipes, soit la première véritable frénésie spéculative de l’histoire moderne, aurait eu lieu entre 1634 et 1637 en période d’essor économique aux Provinces-Unies.

Les premières tulipes ayant foulé le sol hollandais sont arrivées en provenance de la Turquie, et leur beauté a rapidement charmé les habitants des Provinces-Unies. Cet attrait a fait croître la demande, portant ainsi le prix de ces fleurs et à la hausse.

Quelques années après leur introduction, les tulipes ont commencé à contracter un virus baptisé « mosaïque ». Nous portons à votre attention que cette pathologie entraîne la création de motifs sur les pétales de la fleur ressemblant à de petites flammes.

Les tulipes contaminées réagissaient différemment à cette maladie, ce qui a donné naissance à une grande variété de déclinaisons différentes, rendant ainsi chaque fleur unique.

Satire de la  » Tulipomania « 

Le phénomène de rareté a fait grimper leur prix, et bien des personnes à la recherche de profits ont décidé de se lancer dans le commerce des bulbes de tulipe.

La valeur des bulbes montant en flèche, les spéculateurs croyaient que la tendance haussière n’allait jamais s’arrêter.

Flairant l’opportunité d’une vie, les fleuristes hollandais ont vite compris qu’ils étaient assis sur une mine d’or. Au fur et à mesure que la saison avançait et que leurs réserves diminuaient, ceux-ci augmentaient leurs prix pour s’ajuster à la demande croissante.

L’avarice a su gagner le cœur des Hollandais, et plusieurs personnes ont puisé dans leur épargne pour acquérir des bulbes dans l’optique de les revendre ultérieurement à un prix plus élevé.

En seulement un mois lors de la tulipomanie, les historiens sont d’avis que la valeur des tulipes aurait été multipliée de vingt fois.

Alors qu’un bulbe ne valait guère plus qu’un oignon avant la bulle financière, certaines personnes sont allées jusqu’à vendre leurs terres pour ne recevoir qu’une seule tulipe en contrepartie.

À un certain point, les investisseurs précoces ont commencé à graduellement empocher leurs profits, faisant ainsi diminuer le prix.

Graphique – Tulipomanie

Cela a poussé quelques individus prudents à se départir de leurs bulbes, et soudainement, il y a eu un déséquilibre entre le nombre de vendeurs et d’acheteurs.

N’étant plus en mesure de trouver preneur, les propriétaires de tulipes étaient désormais impuissants face à la chute du marché. Tellement de personnes ont tenté de vendre au même moment que les marchands ont cessé d’honorer leurs obligations contractuelles.

Même si le gouvernement a offert de garantir 10 % de la valeur des bulbes, le bear market n’a pas bronché et les tulipes ont été dépouillées de toute valeur, allant même, selon certains récits, jusqu’à causer une crise économique à l’échelle nationale.

Néanmoins, certains historiens affirment que l’ampleur de cette crise a été exagérée par les écrivains de l’époque, et que cette frénésie collective n’a pas eu d’effet majeur sur l’économie des Provinces-Unies.

Le krach boursier de 1929

Bulles financières : de la tulipomanie au Bitcoin ? Image d'une voiture Ford modèle T.

Dans les années 1920, les Américains ont connu une grande période de prospérité. Source de l’image : Pixabay

Les États-Unis ont connu une longue période de prospérité après la Première Guerre mondiale, et l’Amérique devenait le porte-étendard de l’émancipation culturelle et technologique. L’industrialisation battait son plein, l’utilisation de l’automobile était démocratisée et le transport aérien entrait petit à petit dans le quotidien des Américains.

Par la bande, le stock market a tiré profit de cette période connue sous le nom des « années folles ». De 1921 à 1929, le Dow Jones Industrial Average (DJIA) est passé de 60 points à 400 points, créant ainsi une vague de millionnaires.

Ayant une confiance absolue envers l’essor du secteur privé, pratiquement tous les économistes de l’époque recommandaient d’investir dans le stock market. Les investisseurs ont commencé à acheter des valeurs mobilières à l’aide de leviers dans le but de multiplier leurs gains.

Les marchés boursiers continuant sans cesse d’atteindre de nouveaux sommets, des spéculateurs moins sophistiqués ont utilisé leurs propriétés pour acheter des actions populaires comme Ford ou RCA.

La plupart des gens essayant de réaliser des gains n’étudiaient même pas le modèle économique sous-jacent à l’entreprise avant d’investir leur argent.

Ce climat étant propice à la manipulation du marché, des individus malveillants ont donc uni leur force pour profiter de la crédulité des investisseurs. Des banquiers, des courtiers et des traders s’échangeaient de grandes quantités de stocks pour faire croître artificiellement le cours des actifs. Au bout du compte, ces personnes plus aisées arrivaient à empocher de gros profits à l’aide de ce stratagème sans éveiller les soupçons du public, car le marché ne faisait que grimper.

Toujours est-il que toute période de prospérité a une fin. Après que la Réserve fédérale ait tenté de calmer le jeu en augmentant les taux d’intérêt, le bear market s’est installé sur les marchés boursiers.

Panique à Wall Street en 1929

Dans un vent de panique, les investisseurs ont soudainement vendu massivement leurs stocks en date du 24 octobre 1929. En un claquement de doigts, de nombreux spéculateurs utilisant des leviers importants ont fait faillite.

La situation était dévastatrice : le DJIA est passé de 400 points à seulement 145 points en l’espace d’un mois. Il s’en est suivi de l’époque de la Grande Dépression. Au pire de la crise, le DJIA ne valait plus que 42 points, ce qui correspond à une correction de l’ampleur de 89 % lorsque comparé au prix plafond atteint en 1929.

Dotcom Bubble

De 1995 à 2000, le Nasdaq est passé d’une valeur de 1 000 points à 5 000 points. Source de l’image : Pixabay

La Dotcom Bubble (bulle Internet) s’est déroulée de la fin des années 1990 jusqu’au début des années 2000.

Bien que les économistes n’arrivent pas à s’entendre sur les moments ayant marqué le début et la fin de cette période d’hystérie financière, des analystes ont suggéré qu’elle avait commencé en avril 1997 pour se terminer en juin 2003. Selon ces chercheurs, ce serait, au départ, un allègement fiscal qui aurait incité des investisseurs à financer les premières entreprises du secteur.

Développé à l’origine par l’armée à des fins militaires, le Web a su conquérir le cœur des consommateurs américains à partir de l’année 1995. A ce moment, environ 18 millions de personnes l’utilisaient à des fins commerciales.

L’ouverture sur le monde laissait planer une croissance « illimitée » pour les entreprises désirant braver le potentiel de cette technologie révolutionnaire. Cela dit, les investisseurs ont graduellement mis de côté l’analyse de plan d’affaires, car ils étaient éblouis par les « grandes idées » qui leur étaient proposées.

Ne valant que 1 000 points en 1995, le NASDAQ est passé à 5 000 en l’espace de cinq ans. Les compagnies étaient incitées à lancer des Initial Public Offerings (IPO) avant même d’avoir un produit fonctionnel à offrir.

La folie était si intense que certains stocks doublaient en valeur en une seule journée. Le commerce en ligne était l’un des secteurs les plus populaires et l’entreprise Pets.com semblait être partie pour la gloire.

Dotcom bubble – bulle internet

Tout ce qui monte finit malheureusement par redescendre. Alors que la capitalisation boursière du Nasdaq était évaluée à 6,71 trillions de dollars en date du 10 mars 2000, celle-ci a chuté pendant 20 jours pour atteindre 6,02 trillions le 30 mars suivant.

La dégringolade s’est poursuivie, et le Nasdaq ne valait plus que 5,78 trillions de dollars le 6 avril 2000. Notons qu’en l’espace d’un mois, le Nasdaq a perdu un peu moins d’un trillion de dollars.

La situation s’est aggravée et plusieurs entreprises ayant pris rapidement énormément de valeur ont craqué sous le poids de la réalité. Notamment, la société prometteuse Pets.com qui a dû fermer ses portes.

Les quotidiens et les journaux n’ont pas manqué de sauter sur l’occasion pour suggérer aux investisseurs de diversifier leurs portefeuilles et d’éviter d’être trop exposés au secteur des technologies. À titre comparatif, 47 sociétés de l’ère dotcom avaient investi 44 millions de dollars pour diffuser leur publicité au grand public américain à l’occasion du Super Bowl de l’année 2000. L’année suivante, seulement 3 entreprises étaient de la partie.

Le Nasdaq a poursuivi sa descente pendant toute l’année 2002 et s’est finalement stabilisé au début de 2003.

Le Bitcoin et les cryptomonnaies

Le Bitcoin, depuis sa création, a connu plusieurs cycles haussiers et baissiers. Source de l’image : Pixabay

Les devises virtuelles ont connu plusieurs cycles haussiers et baissiers depuis leur création. Pour vous permettre de vous faire une idée complète, nous allons vous exposer les premières bulles du Bitcoin, la bulle de 2013-2014 et enfin, la frénésie spéculative de 2016-2017 suivie du krach ayant plongé le marché dans un bear market pendant l’année 2018.

Les premières bulles du Bitcoin

Satoshi Nakamoto a officiellement lancé le Bitcoin en janvier 2009 après avoir miné le premier bloc. La première transaction de BTC répertoriée aurait eu lieu en 2010 où un homme aurait échangé 10 000 BTC contre deux pizzas.

Au départ, le Bitcoin n’avait donc pas une très grande valeur. En 2011, le BTC est passé de 0,30 $ à 1 $ au début du mois de février. Le prix s’est ensuite rapidement corrigé après que ce seul psychologique ait été atteint.

Toutefois, le cours du Bitcoin a ensuite repris de la vigueur pour frôler la barre des 10 $ au mois de mai suivant. Le 8 juin, chaque BTC valait 30 $. En moins de 6 mois, la valeur du Bitcoin a donc été multipliée de 30 fois. Notons toutefois qu’après avoir atteint ce prix, le BTC n’a cessé de dégringoler pour frapper la barre des 5 $ au printemps suivant.

Lors de l’été de l’année 2012, le cours de cette cryptomonnaie a repris du poil de la bête. Alors que le BTC ne valait que 15 $ à la mi-janvier 2013, le prix du Bitcoin se situait déjà à près de 50 $ en mars.

Ce mouvement de prix a attiré l’attention des spéculateurs, ce qui a porté le cours du BTC à plus de 100 $ le 1er avril 2013. Après avoir atteint 230 $ en date du 9 avril 2013, son prix s’est effondré le jour suivant pour baisser aussi bas que 160 $. Environ une semaine plus tard, chaque token ne valait plus que 70 $.

Bulle financière Bitcoin - Financial bubble

Une bulle du Bitcoin

La bulle de 2013-2014

Le cours de cette devise cryptographique s’est stabilisé durant l’été et a recommencé à grimper durant l’automne 2013. Au début du mois de novembre, chaque Bitcoin avait une valeur de 250 $.

Ce nouveau prix record a captivé l’intérêt de plusieurs investisseurs, lesquels ont acheté massivement du BTC. En moins d’un mois, le prix du Bitcoin est passé de 250 $ à 1 100 $. Le nombre de vendeurs a rapidement excédé le nombre d’acheteurs, ce qui, en fin de compte, a impacté le prix à la baisse.

À la mi-décembre, le Bitcoin ne valait plus que 700 $ et l’engouement des investisseurs s’est rapidement transformé en panique généralisée.

L’échange de devises virtuelles Mt. Gox a fait face à de nombreuses demandes de retrait de la part de ses clients qui cherchaient à mettre leur argent en sécurité. En manque de liquidité, Mt. Gox a déclaré faillite en février 2014.

Cette annonce a eu pour effet de sceller le destin du BTC. Pour le moins de manière temporaire. Le cours du Bitcoin a chuté jusqu’en janvier 2015, moment où le Bitcoin a atteint une valeur plancher de 155 $. À ce moment, la quasi-majorité des adeptes de la cryptomonnaie ont perdu tout intérêt envers le Bitcoin et ont considéré que cet actif non tangible n’avait plus aucune valeur.

Bulle spéculative Bitcoin – 2013

La bulle de 2016-2017

Toujours est-il que le krach suivant la bulle de 2013 n’a pas eu raison du Bitcoin. Au printemps 2015, le cours du BTC s’est agité de nouveau et il s’en est suivi d’une forte croissance durant l’année 2016. En début 2017, le prix du Bitcoin a marqué un nouveau prix record et valait déjà 3 000$ au mois de juin. Après avoir revisité la zone des 1 800 $ en juillet, son prix a par la suite frôlé la barre des 5 000$ à fin du mois d’août suivant.

Cela dit, la Chine a annoncé son intention d’interdire les Initial Coin Offerings (ICO) sur son territoire et le PDG de la banque américaine JP Morgan a qualifié le Bitcoin de « fraude ». Bien des investisseurs ont vendu leurs BTC, portant sa valeur à 3 000$. Néanmoins, le Bitcoin a su encore une fois rebondir pour frôler la barre des 20 000 $ en décembre suivant 2017.

Bitcoin to the moon

Comme vous le savez probablement déjà, l’année 2018 a été bien différente. Le BTC n’a cessé de se déprécier depuis son dernier prix record, et le cours du BTC a revisité la zone des 3 200$ en date du 7 décembre 2018.

Toujours est-il que la dernière période de frénésie spéculative a été porteuse de nouveauté au sein de l’écosystème des monnaies virtuelles.

Plusieurs cryptomonnaies se sont démarquées, comme l’Ethereum (ETH), le Ripple (XRP) et le Bitcoin Cash (BCH). Du même souffle, les ICO ont permis à de nouvelles entités de se constituer et ont contribué à démocratiser la finance. Il n’y a pas de doute : une nouvelle industrie est née.

Mot de la fin

Il est impossible d’identifier à l’avance les marchés qui connaîtront des tendances haussières importantes dans les prochaines années.

Il n’en demeure pas moins que l’histoire est cyclique et que le comportement humain, quant à lui, est prévisible. L’avarice pousse les investisseurs à risquer des sommes dont ils ne disposent pas, ce qui finit ultimement par causer leur perte.

Toutefois, il est important de regarder les choses avec un certain recul. Bien que les actifs financiers aient tendance à s’écrouler après des périodes de fortes croissances, il n’en demeure pas moins que sur le long terme, certaines compagnies, certaines entités et certains produits révolutionnaires gagnent en valeur.

Notamment, après avoir atteint une valeur de 112,59 $ en novembre 1999, Amazon s’est dévalué au point de ne valoir que 5,72 $ en octobre 2001. Cela dit, une action de l’entreprise se négociait à plus de 2000 $ en septembre 2018.

Malgré la chute catastrophique du DJIA en 1929 ayant porté la valeur de l’index à environ 42 points, le Dow Jones Industrial Average a dépassé la barre des 26 000 points au cours de l’année 2018.

Enfin, même si le Bitcoin et les cryptomonnaies ont subi d’énormes pertes dans la dernière année, il est tout à fait possible que certaines d’entre elles arrivent à battre leur record précédent.

L’important, c’est de concevoir une stratégie bien précise et de comprendre que tout marché est cyclique.

Plutôt que de réagir aux émotions générées par la foule, il est primordial de s’éduquer financièrement pour être prêt à réagir aux occasions opportunes au moment où elles se présentent sur un plateau d’argent.

Sources : Investopedia, History Today, The Bubble Bubble, Business Insider, Time, The Motley Fool, CNBC et Bloomberg

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