Un crypto-euro ? Retour sur l’idée évoquée par les banques allemandes

04 novembre 2019 - 12:17

Temps de lecture : 3 minutes

L’association des banques allemandes (Bankenverband) appelle officiellement à la création d’une monnaie numérique adossée à l’Euro.

Le chœur des régulateurs européens 

Dans un document publié le 30 octobre, 200 banques commerciales privées déclarent que « l’économie a besoin d’un euro numérique programmable ». Quelques semaines auparavant, Olaf Scholz, le ministre allemand des Finances, discutait déjà de cette éventualité dans un entretien au média WiWo. Son homologue français, Bruno Le Maire, avait lui aussi déjà appelé à réfléchir à la création d’ « une monnaie numérique publique ». Et pour couronner le tout, la prise de fonction récente à la tête de la BCE de Christine Lagarde, plutôt ouverte sur le sujet, pourrait accélérer le changement. Elle a déjà prévenu qu’elle veillerait « à ce que les institutions s’adaptent rapidement à un environnement financier en mutation rapide ».

Un manifeste pour l’euro numérique qui tombe à point 

Lancement d'un crypto-euro numérique ?

Lancement d’un crypto-euro numérique ?

L’Europe veut relever la tête face à des menaces de plus en plus précises. Le manifeste de la Bankenverbrand, Deutsche Bank en tête, vient opportunément le confirmer. Rappelant la nature des dangers,

« chaque système économique a besoin d’une monnaie stable – c’est l’élément central de la souveraineté de l’État, légitimée démocratiquement. (…) il ne peut être du travail d’une entreprise privée à but lucratif de mettre une monnaie numérique en circulation. »

elle s’oppose fermement au projet Libra de Facebook. Inquiète aussi face au lancement imminent d’une « cryptomonnaie » made in China, l’association propose donc une version possible d’un euro défensif sous la forme d’une « monnaie numérique programmable ».

Une monnaie cryptée

Après les précautions d’usage où le lobby bancaire réaffirme avec force que la responsabilité du système monétaire relève des prérogatives de l’Etat, le plaidoyer commence. Il est affirmé  qu’un euro « crypté » serait le seul moyen de résister à la montée en puissance des géants chinois et américains. L’insistance porte sur l’aspect « programmable » de  ce nouvel euro. Rappelons au passage  ce que c’est que l’argent programmable. C’est une monnaie cryptographique dont il est possible de planifier les transactions, de décider de leur échéance et  de les combiner avec des smart contracts .

Si, selon ses termes, « l’Europe ne doit pas rester spectatrice »,  la Bankenverbrand considère  donc que son euro numérique  programmable (contrôlable donc) pourrait efficacement agir sur trois fronts. D’abord, mieux contrôler les flux financiers. Ensuite, booster la croissance économique. Enfin, réaffirmer la souveraineté des Etats membres.

Un euro programmable sans blockchain, c’est un crypto-euro qui tombe à l’eau

Attention à ne pas se louper.

Attention à ne pas se louper.

Mais à y regarder de plus près, ce que l’organisation allemande propose, c’est uniquement une adaptation de la monnaie à l’ère numérique. C’est à dire créer un euro entièrement numérisé – soit, mais 90% des euros ne le sont-ils pas déjà ? – qui serait comme dans le système actuel, distribué par les banques commerciales. Et, bien qu’elle évoque un « crypto-based digital euro », son outil numérique ne sera pas même construit sur une blockchain « permissionned » (DLT).  Il reposera juste sur une évolution du système monétaire en vigueur. La seule nouveauté étant l’élaboration d’une plateforme à l’échelle européenne pour fédérer les opérations. Enfin, comme convenu, l’actif devra se conformer aux normes réglementaires.

Un outil monétaire liberticide

Il devra notamment respecter le cadre juridique en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Les transactions tout comme les clients seront donc parfaitement traçables. Nous voilà rassurés sur notre vie privée bientôt privée… de tout. On a  l’impression désagréable que les régulateurs  continuent de briller surtout par leur entêtement à ne pas vouloir comprendre  les nouvelles technologies liées aux cryptoactifs. Et, ce que l’on retient au final, c’est que la surveillance de masse est en marche. Voeu liberticide en complète contradiction avec le respect de la vie privée dont l’Europe, avec le RGPD (le règlement général sur la protection des données), se targue d’être le fer de lance.

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