À quoi ressemblera l’argent dans 10 ans ?
02 juin 2020 - 17:00
Temps de lecture : 3 minutes
Par Hugh B.
L’argent tel que nous le connaissons pourrait bien être en train de vivre ses dernières heures. Il devient difficile d’imaginer que rien ne va changer, lorsque l’on voit la Réserve Fédérale américaine imprimer des billets comme s’il s’agissait de simples morceaux de papier. Pourtant il semble que les gouvernements soient encore plus enclins à empêcher le développement des monnaies numériques qu’à s’y inscrire. Mais ont-ils encore réellement le choix ?
La course aux monnaies numériques est enclenchée, mais tous les coureurs ne mettent pas les mêmes implications dans ce qui pourrait être un tournant monétaire majeure de ce début de 21e siècle. La Chine semble l’avoir compris avant les autres. Elle est clairement en tête et tente de se positionner comme le leader dans cet univers encore en pleine construction. Elle a cependant des concurrents de poids dans le domaine.
L’avenir de l’argent
Dans une récente interview donnée au site Internet Medium, Katie Haun aborde cette question de l’avenir de l’argent dans notre société. Elle est associée générale du fonds américain de capital risque Andreessen Horowitz, plus connu sous le nom de a16z et fondé en 2019. Et sa vision ne laisse pas beaucoup de place au doute.
« Fondamentalement, tout le monde sur la planète a besoin de transférer de la valeur. » – Katie Haun
Elle prend pour cela exemple sur les avancées du passé qui nous semblent évidentes aujourd’hui, alors qu’elles ont été un changement important de notre manière de faire les choses. Il suffit de constater que la musique est devenue numérique alors qu’il y a peu nous avions des cassettes audio. Idem pour les livres qui se dématérialisent de plus en plus. Alors en quoi serait-il impossible d’imaginer une monnaie numérique à terme ?
Et selon Katie Haun cela n’a rien à voir avec des solutions comme Paypal, Visa ou même Alipay que certains rangent dans cette catégorie. Car une monnaie implique une reconnaissance de dette physique d’une structure de type bancaire. Dans 10 ans, tout cela sera porté par des bits et des octets.
Le Libra refait surface
Même si certains prétendent que le Bitcoin ne remplacera pas le dollar, une autre monnaie numérique le pourrait. Katie Haun parle ici du Libra de Facebook comme d’un concurrent sérieux à ce changement de paradigme en cours. Ce dernier fait un retour en force après avoir été laissé pour mort par les instances de régulation américaines.
Elle aborde cette question en comparant la situation actuelle aux prémices d’Internet. Une analogie récurrente dans le milieu des cryptomonnaies qui n’est pas du goût de tout le monde, mais qui a du sens. Et de ce point de vue, le Libra de Facebook serait une sorte de version bêta de ce que va devenir l’argent dans la prochaine décennie. Une intrusion des BigTech dans le paysage monétaire qui n’est pas du goût de tout le monde.
« Ils ont (le Libra) réalisé une grande percée technologique. Mais rien n’est encore prêt pour son adoption, même si cela arrive. Et vous ne pouvez pas le mettre entre les mains du public tant qu’il n’est pas prêt et performant. » – Katie Haun
Arrivé trop tôt, dans un environnement monétaire incapable de l’accueillir, il n’en dessine pas moins l’avenir de notre relation à l’argent. Son lancement, même raté a d’ailleurs précipité et confirmé les projets de monnaies numériques de Banques centrales (CBDC). Un mouvement ensuite fortement accéléré par la crise sanitaire du coronavirus.
La Suède revient à l’argent liquide
Dans le même temps, la Suède fait marche arrière dans le domaine. Ce pays se présentait comme le fleuron de la monnaie numérisée, ayant banni progressivement le cash depuis 2018. Mais une loi vient d’entrer en vigueur au début de cette année pour imposer de nouveau l’accès à l’argent liquide. Il s’agit de « l’obligation pour les institutions de crédit de fournir des services en argent liquide. »
« Le paiement électronique présente beaucoup d’avantages, mais on doit aussi pouvoir utiliser le cash. Les personnes âgées, les handicapés, ceux qui viennent d’arriver en Suède doivent pouvoir payer en liquide. » – Per Bolund, ministre des Marchés financiers
Dans ce pays, tout peut se régler par carte bancaire, du paquet de chewing-gums à la quête dans les églises. Impossible de se procurer de la monnaie ou de trouver un distributeur de billets. Mais cette réalité a très rapidement montré ses limites en termes d’inégalités sociales et de fracture numérique.
La mise en place de monnaies de type numérique soulève souvent la question de la résolution de problèmes techniques ou de leur intégration par les instances de régulation. Quoi qu’il en soit, leur avénement pour la prochaine décennie semble enclenché et inévitable. Mais tout comme pour le développement d’Internet, le véritable défi ne se situe-t-il pas au niveau des utilisateurs ?
Internet est accessible au grand public depuis plus de 20 ans, mais il reste la source d’une forte fracture numérique, qu’elle soit générationnelle, économique ou géographique. Le véritable enjeu serait donc de ne pas reproduire cette inégalité dans le domaine des monnaies numériques qu’elles soient de Banques centrales (CBDC), de BigTech ou décentralisées.
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