NFT vs délit d’initié – Bientôt considérés comme des titres financiers ?
03 juin 2022 - 09:00
Temps de lecture : 3 minutes
Par Hugh B.
Les innovations en rapport au marché des cryptomonnaies ont cette particularité de n’entrer – pour le moment – dans aucune case. En tout cas pas de celles qui existent déjà dans les rayonnages des instances de régulation. Raison pour laquelle ces dernières s’arrachent les cheveux afin de trouver un moyen de les intégrer dans leur champ d’action. Avec en tête de ce cortège la Securities and Exchange Commission américaine, bien décidée à tout transformer en titres financiers. Et pourquoi pas les NFTs récemment mis en avant dans une affaire de délit d’initié qui pourrait bien tout changer…
Il ne faut pas sous-estimer la capacité de la SEC à tout voir comme des titres financiers. Surtout de la part de son président actuel Gary Gensler parfois proche de la crise de démence sur le sujet. En particulier dès qu’il s’agit du secteur des cryptomonnaies et de ses nombreuses innovations développées hors de tout cadre légal. Et cette douloureuse certitude : même si la réglementation a toujours un train de retard, elle finit inévitablement par arriver en gare. Et sa prochaine étape pourrait bien être le tout nouveau marché des jetons NFT.
En effet, une affaire de délit d’initié au sein de la plateforme Opensea vient de refaire parler d’elle dans le cadre de son procès. Une pratique mise à jour en septembre de l’année dernière. Avec comme protagoniste le chef de produit de ce leader du marché des NFTs. Mais le plus important est ailleurs. Car ce procès met pour la toute première fois en avant l’accusation de « délit d’initié » en relation au secteur des jetons non fongibles. Et cela n’a bien évidemment rien d’une bonne nouvelle.
NFT + délit d’initié = titres financiers
Ce sont toujours les mauvais comportements de certains qui finissent par imposer un contrôle à tous les autres. Une règle immuable confirmée par la récente affaire de fraude interne découverte dans les rangs de la plateforme Opensea. Tout cela à l’origine d’un procès tenu en ce moment même à Manhattan. Avec comme raison invoquée, une accusation de « fraude électronique et blanchiment d’argent en relation avec un stratagème visant à commettre un délit d’initié. » Une pratique visiblement courante dans le secteur des cryptomonnaies, dont l’apparente liberté proclamée ne veut définitivement pas dire la même chose pour tout le monde.
« Les NFTs sont peut-être nouveaux, mais ce type de stratagème criminel ne l’est pas. Comme allégué, Nathaniel Chastain a trahi OpenSea en utilisant ses informations commerciales confidentielles pour gagner de l’argent à des fins personnelles. Les accusations d’aujourd’hui démontrent l’engagement de ce bureau à éradiquer les délits d’initiés. Cela qu’ils se produisent sur le marché boursier ou la blockchain. »
Damian Williams, avocat
Et la mention de ce terme « délit d’initié » n’a rien d’anecdotique. Car c’est la toute première fois qu’il est juridiquement utilisé en lien à une affaire mettant en cause le secteur des cryptomonnaies… et plus particulièrement des jetons NFT. En effet, et jusqu’à présent, son utilisation était réservée aux fraudes de ce type perpétrées sur le marché plus traditionnel des titres financiers. Ce dernier sous gestion de la fameuse Securities and Exchange Commission américaine (SEC). Et c’est là que tout pourrait rapidement se compliquer.
NFT – Des titres financiers encore ignorés ?
Car, historiquement parlant, la SEC n’a pas besoin de beaucoup d’éléments pour entamer des procédures agressives. Il suffit de voir le procès qui l’oppose depuis maintenant des années au projet Ripple. Cela au sujet de l’émission de sa cryptomonnaie XRP, considérée comme un titre financier émis sans autorisation de sa part. Des outils financiers au sujet desquels ils est pénalement possible de répondre de l’accusation de délit d’initié. Cette dernière justement utilisée dans le cadre du procès en cours à l’encontre de Nathaniel Chastain. Un chemin tout tracé pour qui veut y voir un lien de cause à régulation. En tout cas selon les conclusions de l’ancienne avocate de la Securities and Exchange Commission, Alma Angotti.
« Cela pourrait très bien être un titre selon le test Howey. Si vous achetez un NFT en espérant que le prix augmentera pour en tirer des bénéfices, ce n’est pas très différent des titres financiers. (…) Le détournement des informations confidentielles de votre employeur est une fraude, et une fois que vous transférez le produit de cette fraude à travers le système monétaire, c’est du blanchiment d’argent. Cette accusation n’est pas du tout surprenante. »
Alma Angotti
Le test de Howey est une manière de déterminer si une transaction entre dans le cadre d’un contrat d’investissement, ou titre financier (security). Cela afin de savoir s’il faut le soumettre à une déclaration et un enregistrement spécifique. Et cette procédure se résume à définir si « un investissement d’argent dans une entreprise » est effectué « avec une attente raisonnable de profits à tirer des efforts d’autrui. » Tout un programme !
La question étant de savoir si certains investisseurs achètent réellement des NFTs de la collection CryptoPunks parce qu’ils aiment les vieux pixels. Ou comme un simple placement spéculatif dans « l’attente raisonnable de profits à tirer des efforts d’autrui. » Une opération pas forcément très rentable à l’heure actuelle. Et une question qu’il vaudrait mieux que la SEC ne se pose pas, avec son (absence de) tact légendaire.
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