L’Europe possède le plus grand nombre de banques crypto-friendly

Dans un rapport très détaillé mené conjointement par la place de marché Finery Markets et le cabinet-conseil Panterra Finance, étudiant le paysage des banques crypto-friendly à travers la planète, il apparaît que l’Europe sort grande gagnante de la comparaison. Voyons voir de plus près.

15 mai 2023 - 17:54

Temps de lecture : 7 minutes

Publié il y a un mois, mais relayé tout récemment sur Twitter par le directeur stratégie Europe de Circle, Patrick Hansen, un rapport du site de classement Coincub sur les économies crypto dans le monde vient de recenser la localisation géographique des banques crypto-compatibles. Et sur la première marche du podium, l’Europe arrive largement en tête avec 55 établissements recensés, suivie dans un mouchoir de poche de l’Asie (24) et de l’Amérique du Nord (23).

Banques et crypto : une relation tourmentée

Les banques, rappelons-le, relèvent d’un secteur très réglementé. Elles sont à ce titre très encadrées au niveau national, mais également supranational avec le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire qui fixe les normes bancaires internationales.

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Le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire, émanation de la Banque des [...]

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Aussi, ont-elles toujours été ambivalentes face au phénomène montant des cryptomonnaies, oscillant entre la tentation de soutenir un secteur innovant qui pourrait s’avérer très lucratif, et la frilosité face à un secteur insuffisamment régulé contre lequel leurs autorités de tutelle les ont très vite mises en garde.

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Le contexte récent, l’effondrement de trois banques américaines  (Silvergate BankSilicone Valley Bank et Signature Bank)  ont réactualisé plus que jamais l’histoire tourmentée unissant d’un côté les tenants de la finance traditionnelle et les acteurs d’un modèle disruptif. En effet, c’est leur activité crypto, plus ou moins développée, qui a été pointée du doigt par les régulateurs US comme justification, au moins partielle, à leur chute.

La déroute de la First Republic Bank peu de temps après, qui n’avait a priori aucune exposition à ces actifs dits risqués, viendra très vite contrarier ce récit anti-crypto. Mais, quoi qu’il en soit, dans un environnement réglementaire hostile, les Etats-Unis ne sont plus aux yeux de beaucoup, comme le rappelle le rapport, la meilleure option pour tabler sur le duo fonctionnel banques et sociétés crypto. Sociétés qui, rappelons-le, ont un besoin impérieux de passerelles avec la finance héritée pour faire exister et prospérer leur business.

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L’Amérique du Nord reléguée à la 3ème place

Si les Etats-Unis ne sont plus la terre d’élection des entreprises crypto, notamment en raison d’une « stratégie coordonnée pour débancariser l’écosystème des actifs numériques aux Etats-Unis » selon certains membres du Congrès, il reste néanmoins des établissements qui leur fournissent encore des services. Le rapport en cite les plus notoires.

(…) début avril 2023, (…) Coinbase travaille avec Pathward Financial (anciennement MetaBank) et JPMorgan Chase. Parmi les autres banques faisant affaire avec des entreprises de cryptographie figurent Customers Bancorp, Western Alliance, JPMorgan Chase et Bank of New York Mellon.

Mais on pourrait également mentionner les nouveaux partenaires de Circle, l’émetteur de L’USDC, qui avait une partie de ses réserves dans les banques en faillite : Citizens Trust Bank, New York Community Bank et Cross River Bank. Au sujet de cette dernière, le partenariat pourrait tourner court puisqu’elle fait aujourd’hui l’objet d’une procédure de la part de l’instance de régulation bancaire américaine, la FDIC pour pratiques « dangereuses ».

Le fait est qu’avec le Canada, qui voit également se resserrer les règles encadrant l’activité crypto, poussant des acteurs majeurs comme Binance à jeter l’éponge, le continent nord-américain compterait en tout 23 banques crypto-friendly selon les recherches de Coincub.

L’Europe arrive bonne première avec 55 banques crypto-compatibles

Et contre toute attente, c’est le vieux continent, plus réputé pour son conservatisme que pour son goût de l’innovation, qui tire son épingle du jeu. La raison majeure, une orientation législative claire à l’opposé du brouillage réglementaire et punitif qui sème le chaos de l’autre côté de l’Atlantique, notamment avec l’adoption dans l’Union européenne, du règlement sur les marchés des actifs cryptographiques (MiCA) qui devrait entrer en vigueur dans quelques mois.

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Le Parlement européen vient d'approuver massivement les règlements MiCA et [...]

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Avec cet arsenal réglementaire, le plus complet à ce jour à l’échelle mondiale, l’Union européenne pose les bases, imparfaites certes, d’un environnement plus apaisé qui conduira vraisemblablement à une moindre méfiance entre finance traditionnelle et économie crypto. Mais l’Allemagne n’a pas attendu MiCA pour s’engouffrer dans ce nouveau secteur.

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Notre voisine d’outre-Rhin a entamé une politique d’ouverture aux cryptos il y a déjà quelques années. Politique qui lui a valu d’occuper la première place des pays crypto-friendly à l’échelle de la planète en 2022 et qui l’a vu s’opposer aux dispositions abusives de l’UE en matière de contrôle des transferts crypto. Pas étonnant donc que dans le classement de Coincub, elle occupe le devant de la scène avec 6 établissements crypto-friendly avérés.

France 2, Royaume-Uni 14

A titre de comparaison, la France, qui a attiré ces derniers mois des acteurs de la crypto aussi importants que Binance, Crypto.com, Circle qui veulent rayonner en Europe à partir de l’hexagone, en obtenant le fameux agrément prestataire de services sur actifs numériques (PSAN) qui a largement inspiré MiCA, est un peu à la traîne. En effet, elle ne peut se prévaloir que de deux banques compatibles avec l’activité crypto :  SG Forge, la division crypto de la Société Générale, troisième banque française, et la discrète Delubac & Cie qui l’avait précédée dans son enregistrement PSAN. Et on ne s’attardera pas sur les difficultés que connaissent encore aujourd’hui les PSAN français pour trouver un partenaire bancaire…

De fait, c’est hors UE, qu’on trouve le leader des banques crypto-compatibles. Le Royaume-Uni peut en effet se prévaloir de 14 établissements selon Coincub. Mais c’est une situation enviable qui pourrait ne pas durer, ces derniers exprimant une mauvaise volonté de plus en plus manifeste pour traiter avec leurs clients pro-crypto, sociétés ou particuliers.

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La Suisse et le Liechtenstein, pionniers en la matière

La Suisse et le Liechtenstein se sont précocement positionnés sur ce secteur. La première avec deux banques crypto-natives dûment réglementées par l’autorité de régulation locale (la FINMA) : Sygnum et SEBA bank, qui ont étendu leurs activités bien au-delà de leurs frontières originelles. Aujourd’hui, la première déclare recevoir de nombreuses demandes d’intégration, émanant notamment du Moyen-Orient, depuis la chute de Silvergate et des deux autres. En revanche, les sociétés basées aux USA ne pourront vraisemblablement pas faire affaire avec elle, Sygnum ne les accepte pas. Quant à SEBA, elle se dit selon le rapport, méfiante face aux clients américains.

Cette dernière a d’ailleurs noué un partenariat avec la plus grande banque privée du monde située au Liechtenstein, la LGT Bank, pour mettre en place des services de garde et de courtage de crypto pour les clients privés dans la principauté et en Suisse. LGT opère également dans des contrées compatibles avec la crypto à Singapour et aux Émirats arabes unis selon Coincub. Mais le Liechtenstein est aussi le berceau de Bank Frick, première banque en Europe à proposer la blockchain banking, devenu partenaire principal de Kraken récemment.

Pour les autres pays européens, à l’exception de Malte, toujours  » une « île blockchain » pour Coincub en dépit d’une concurrence insulaire féroce (Bahamas et Bermudes en tête), de deux Etats baltes, l’Estonie et la Lituanie, et d’une Suède à égalité avec la France, la moisson est maigre avec une seule banque recensée pour chaque juridiction.

L’Asie confirme son tournant crypto avec 24 établissements la hissant à la 2ème place dans le classement mondial

Depuis le début de l’année, les spéculations vont bon train pour savoir qui va remplacer les Etats-Unis comme moteur de croissance de l’activité crypto. Et dans ces prospectives, l’Asie semble bien partie alors qu’un certain nombre de ses juridictions semblent jouer la carte de l’assouplissement, et notamment la Chine via le territoire indépendant de Hong Kong.

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Hong Kong, avec le soutien discret de la Chine, ouvre des perspectives sur une Asie comme pôle crypto majeur

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A ce sujet, les recherches de Coincub sont quelque peu confuses. Evoquant l’interdiction (?) des banques chinoises comme Bocom et Bank of China sur sa zone continentale, elles les intègrent néanmoins comme banques crypto-compatibles pour l’intérêt qu’elles manifestent pour les sociétés cryptos qui se délocalisent à Hong Kong… Une logique curieuse, révélatrice de l’embrouillamini qui règne toujours quand on parle de la Chine et des cryptos.

Le Japon en pôle position

Singapour qui a perdu son éclat de pôle majeur de l’activité crypto, peut encore revendiquer 4 établissements institutionnels « bienveillants » avec les artisans de la crypto, dont la DBS, plus grande banque d’Asie du Sud-Est en termes de gestion d’actifs, qui a ouvert le trading de cryptos à tous ses clients sans distinction. Et ce, en dépit d’une Autorité monétaire (MAS) qui a décidé que les banques singapouriennes étaient tenues d’appliquer une pondération de risque de 125 % pour l’exposition à des actifs cryptographiques « plus risqués » tels que le bitcoin et l’éther. La cité-État a également soumis à discussion la limite d’accès des particuliers aux cryptos.

En Corée du Sud,  quatre des cinq principales banques du pays proposent sous une forme ou une autre de services de cryptographie selon le rapport dont les sources datent un peu, mais de récentes enquêtes financières lancées à leur encontre pourraient changer la donne précise t-il. 

Quant au Japon, il semble illustrer la règle selon laquelle un environnement réglementaire clair suscite les vocations bancaires. Ainsi, l’archipel compte 7 banques interagissant d’une manière ou d’une autre avec l’univers crypto, le plaçant en tête des pays asiatiques.

L’Amérique latine au pied du podium avec 14 établissements bancaires pro-crypto

Enfin, on ne peut pas ne pas évoquer l’Amérique latine avec le premier pays qui a fait de Bitcoin une monnaie légale. On aura reconnu le Salvador qui, en légalisant la première cryptomonnaie, a incité les banques à le prendre en charge. De fait, la plus petite nation de la zone (à peine 6,5 millions d’habitants dont la majorité est débancarisée) compte 3 banques fournissant des services bitcoin.

Ce n’est pas rien, et c’est tout autant que le Brésil qui monte en puissance année après année dans l’économie des actifs numériques, et qui a adopté en décembre dernier un cadre réglementaire susceptible de développer encore ce secteur et le lien crypto-banque.

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Typologie des banques crypto-friendly

Le rapport de Coincub donne aussi à voir les caractéristiques des banques qui ont un ou deux pieds dans la crypto. Elles relèvent de trois groupes, à savoir à l’instant T de l’étude : les banques traditionnelles (61), les banques fintech et numériques (46), et les banques axées sur la cryptographie (19). Le paysage est certes fragmenté, mais révèle tout de même selon le document, « une tendance croissante des acteurs traditionnels à s’adapter à l’industrie de la cryptographie ».

Oui, peut-être, mais on peut légitimement s’interroger sur la façon dont ils vont pouvoir s’accommoder d’exigences toujours plus drastiques pour gérer leur exposition à cette nouvelle classe d’actifs.

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L'UE veut imposer des mesures de verrouillage drastiques aux banques exposées à la crypto

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