Les cryptomonnaies menacées aux US au nom de la protection de l’enfance !

05 février 2020 - 12:39

Temps de lecture : 2 minutes

Sous prétexte de lutter contre la pédocriminalité en ligne, des législateurs américains proposent un projet de loi visant à interdire l’usage de la cryptographie.

Une cryptographie porteuse de tous les maux

L’attorney général (l’équivalent du ministre de la justice en France), William Barr, qui jouit de la pleine confiance de Donald Trump, s’est fendu d’une diatribe contre la cryptographie lors du sommet de la Maison-Blanche portant sur la traite des êtres humains.

 » Nous vivons à l’ère numérique, et comme tout le monde, les trafiquants d’êtres humains s’appuient de plus en plus sur la communication numérique et Internet Et de plus en plus, les preuves sur lesquelles nous nous appuyons pour détecter et traiter ces prédateurs sont des preuves numériques.Cependant, de plus en plus, ces preuves sont cryptées. (…) Nous voyons un cryptage de qualité militaire commercialisé sur des produits de consommation tels que les téléphones portables et les plateformes de médias sociaux et les services de messagerie. Cela signifie que nous ne pouvons pas accéder à ces données. (…) Des sites sont impénétrables aux forces de l’ordre. Nous devons faire quelque chose à ce sujet. »

Ce n’est pas la première fois que William Barr exige un accès légal aux données cryptées. On peut même affirmer que c’est l’une de ses obsessions qu’il brandit dès qu’il en a l’occasion. Son ignorance des principes de sécurité technologique étant à la mesure de son opportunisme.

Lalibi de la lutte contre la pédocriminalité

Il n’est pas le seul dans ce cas, on peut même dire qu’il est plutôt bien soutenu.  Ainsi, c’est un sénateur républicain, Lindsey Graham,  connu pour s’être vanté de n’avoir jamais envoyé d’e-mail,  qui est l’un des artisans du fameux projet de loi. L’autre est un sénateur démocrate, Richard Blumenthal, qui s’est volatilisé depuis,  n’assumant vraisemblablement plus le contenu de la proposition.  Baptisé élégamment «Élimination de la négligence abusive et rampante des technologies interactives de 2019» (EARN IT Act ), le projet propose, s’il est adopté, la création d’ une «Commission nationale pour la prévention de l’exploitation des enfants en ligne» (NCOCEP).

La dite commission sera dirigée par le sus-nommé Barr qui aura le pouvoir de forcer les entreprises technologiques à livrer leurs données cryptées. Le prétexte :  faire adopter «les meilleures pratiques pour les fournisseurs de services informatiques interactifs concernant la prévention des comportements d’exploitation des enfants en ligne ». Ce projet a provoqué un tollé. Le FBI lui-même, pris en faute par le passé, ne semble pas convaincu par cette possible interdiction du chiffrement. Mais les salves en rafale sont évidemment venues des entreprises concernées.

De la bouffonnerie en Barr

https://twitter.com/getongab/status/1223289800326811656?s=20

Riana Pfefferkorn, membre du Center for Internet and Society de la Stanford Law School, s’en est également indignée.

« Alors que la loi EARN IT vise visiblement l’article 230, c’est en fait une manière sournoise d’affecter [les lois de chiffrement] sans les amender directement. Ce projet de loi (…)  est potentiellement inconstitutionnel en vertu des premier, quatrième et cinquième amendements . « 

Elle a surtout insisté sur le fait que si la loi obligeait légalement des entreprises à autoriser l’accès à leurs informations chiffrées, cela constituerait une vulnérabilité « clé d’or » pour des pirates malveillants.

Plus globalement, ce que les observateurs constatent, c’est que le Congrès américain n’a pas une approche unifiée du problème. L’adoption de cette mesure semble donc très hypothétique. Ce n’est vraisemblablement pas, en cette année électorale, que le couperet tombera sur les cryptomonnaies en territoire américain.

 

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