La blockchain à boire et à manger : le vin, analyse et état des lieux

18 octobre 2019 - 09:11

Temps de lecture : 4 minutes

Dans le secteur du vin qui brille souvent par son opacité, une technologie blockchain adaptée peut apporter de sérieux avantages. Meilleure traçabilité, garantie d’intégrité, lutte contre la contrefaçon… Voilà un petit aperçu de ses prouesses actuelles.

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Une contrefaçon galopante

La contrefaçon est une plaie de la planète vin : au moins 20% du vin vendu dans le monde serait frauduleux. En Chine, où le marché est florissant, une bouteille sur deux ne serait pas ce qu’elle prétend être. Plus généralement, la falsification s’est organisée et se déploie maintenant aussi à l’échelle industrielle.

On est loin de l’histoire rocambolesque de Rudy Kurniawan. Ce fin palais, bricolant tout seul dans son coin, a dupé les meilleurs experts américains et vendu pour des dizaines de millions de dollars de faux grands crus. Aujourd’hui le faussaire dort en prison, mais ses flacons frauduleux sont toujours dans la nature. Rien de mieux a priori que d’utiliser une blockchain pour leur courir après.

Cet épisode épique qui a ébranlé le monde du vin en 2016 a conduit deux femmes à collaborer pour endiguer ce fléau. Maureen Downey, experte en vins d’exception chez Chai Consulting s’est associée à Leanne Kemp, fondatrice d’Everledger, pour lancer Chain Wine Vault. S’appuyant sur la compétence blockchain d’Everledger, reconnue notamment pour la traçabilité des diamants, elles ont conçu un outil inégalé.

Les marqueurs anti-fraude

Pour créer une empreinte numérique difficilement falsifiable, l’authentification du vin repose sur 90 données. De la photographie haute résolution aux enregistrements de propriété et de stockage en passant par les caractéristiques de l’étiquette, les mesures de la bouteille, la qualité du verre et du bouchon… Le tout bien sûr certifié sur une blockchain dédiée.

Une fois cette étape réalisée par des experts indépendants, une pastille transparente est apposée sur le col de la bouteille. Elle concentre la combinaison de trois procédés. Outre un hologramme (qu’on peut retrouver sur l’étiquette), elle contient deux dispositifs interactifs. Le premier est un QR code qui permet de lire les informations. Le second, un tag RFID, est une technologie d’identification qui sauvegarde et récupère des données à distance par radiofréquences.

Vin à puce

Si la certification conçue par les deux expertes a fait ses preuves, d’autres leur ont emboîté le pas en faisant des sauts de puce. The Oversea Liquor tracking platform par exemple, permet d’accéder aux données du vin en scannant une puce NFC et non RFID. La différence, c’est que l’échange de données se fait à moins de 10cm entre deux appareils équipés du dispositif. Accessible via une application VeChain, cette puce scellée près du bouchon – détériorée, elle devient obsolète – a équipé, en 2017, 10 000 bouteilles de Beaujolais Nouveau avant d’être exportées et distribuées en Chine. Les clients rassurés sur sa provenance, ont pu goûter un « authentique » breuvage primeur en déchiffrant à loisir toute la chaîne logistique du flacon.

A l’autre bout de la planète, l’application My Story, toujours en partenariat avec Vechain, éclaire l’amatrice qui veut tout savoir de l’ensorcelant Barolo Chiarlo tandis que le buveur qui lui en pince pour le frais Falanghina de Volpone, scanne le QR code conçu par EY Opschain. Indéniablementaujourd’hui, les applications blockchain fleurissent en grappes.

Sécuriser le marché secondaire des premiers crus

Dans un contexte très concurrentiel, iDealwine, première maison de vente aux enchères de vins en France, s’y implique aussi. Son application WineDex, dont le lancement serait imminent, propose une solution de traçabilité et de certification construite sur le réseau Ethereum. Concrètement, les grands crus, dûment expertisés, seront vendus sur la plateforme équipés d’un tag RFID. Ainsi parés, on pourra les suivre tout au long de leur vie. Chaque nouvel événement y sera enregistré, changement de propriétaires et conditions de transfert inclus.

Si tout est fait pour rassurer la consommatrice en quête de pépites ou le spéculateur assoiffé de profit, il s’agit aussi de créer un nouveau modèle financier pour les vignerons. Exposés aux aléas climatiques, ils supportent également des coûts élevés liés au cycle du vin : culture, élevage, stockage, distribution. Que de saisons entre la production et la vente du nectar ! Or, la blockchainisation va leur permettre d’accélérer et de fiabiliser le processus de financement. Une modernisation bienvenue de l’allocation bordelaise saturée d’intermédiaires.

Une cryptomonnaie adossée à une bouteille et fidélisation du client

Il est à parier qu’un nombre croissant de domaines va suivre les traces de Costaflores. Ce vignoble argentin, en partenariat avec le projet opensource OpenVino, est le premier au monde à avoir créé, selon ses dires, sa propre cryptomonnaie. Plus précisément, après une ICO lancée en mai 2018, un jeton ERC20, le MTB18 (19 pour le millésime suivant), a été émis pour chaque bouteille produite. Son coût ayant été fixé sur le prix de revient d’un flacon.

Outre une liquidité bienvenue, cette désintermédiation permet une meilleure fluidité des échanges avec les clients. Adoptant le même principe, VinX propose aux vignobles de commercialiser leurs vins en direct par l’émission de smart contracts. Smart contracts qui pourraient aussi, en cas d’intempéries, accélérer les processus d’indemnisation, en étant reliés à des capteurs implantés dans les vignes.

Bourgogne et Bitcoin, même combat ?

Sachant que plus de 32 milliards de bouteilles sont vendues chaque année dans le monde, le marché du vin attise les convoitises. Dans un univers complexe où se débattent profanes déroutés et professionnels méfiants, il existe un besoin impérieux de transparence. Rien d’étonnant alors que le monde viticole, depuis longtemps frotté de technologie, verse allègrement dans la blockchain.

Opportunisme ou nécessité ?

La question se pose dans la mesure où, parfois, un simple registre de données décentralisé adossé à un processus de sécurisation suffirait. Un protocole blockchain n’attestant pas, on le sait, de la fiabilité des données initiales. Assurément, la question reste ouverte. Le plus probable en revanche, c’est que demain, nous trinquerons joyeusement avec du vin tokenisé.

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