L’Union européenne à la manoeuvre pour une surveillance accrue des transactions crypto

28 mars 2022 - 17:33

Temps de lecture : 3 minutes

Alors que la cryptosphère européenne vient à peine de se relever d’un combat (temporairement ?) remporté contre un amendement abusif relatif à la preuve de travail (PoW), elle doit de nouveau faire front contre une proposition imposant une surveillance sévère des transactions crypto qui pourrait s’étendre aux portefeuilles de type Ledger. La Commission des affaires économiques et monétaires (ECON) du Parlement européen doit se réunir jeudi prochain pour valider ou pas un projet qui s’avère encore mortifère pour l’écosystème crypto local.

Nouvelle épreuve pour la crypto en Europe

Une semaine à peine après le rejet de l’amendement litigieux de MiCA visant à limiter drastiquement le mécanisme de preuve de travail, l’Union européenne remet le couvert. Et toujours le couteau entre les dents. Cette fois-ci, ce sont les transactions réalisées par les exchanges régulés qui sont dans son viseur. Avec une attention toute particulière portée aux portefeuilles auto-hébergés. Périphérique matériel de type Ledger ou Trezor, ou application logicielle comme Metamask ou WalletConnect.

En fait, ce projet de règlement qui sera soumis à la désormais fameuse Commission ECON jeudi, a pour objectif d’actualiser la règle dite « du voyage » recommandée par le redouté Groupe d’action financière (GAFI). L’organisme international qui élabore des normes, et surveille leur application, pour lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT), y a déjà largement intégré des dispositifs relatifs aux cryptomonnaies. Dispositifs qui sont en cours d’actualisation en raison de l’adoption croissante des crypto-actifs et de l’innovation incessante du secteur, mais qui ont déjà donné des sueurs froides aux acteurs de l’industrie US.

Régulation

Les portefeuilles de type Ledger dans le viseur des régulateurs

Nathalie E. - 28 Nov 2020 - 16:33

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Globalement, le GAFI n’invente rien. Il cherche plutôt à adapter aux cryptomonnaies les standards financiers en matière de taxes et de conformité. Et c’est justement dans la perspective de refonte de son système LCB-FT que la Commission européenne veut intégrer les cryptos à son nouveau régime.

Jusqu’à aujourd’hui, les crypto-actifs sont restés en dehors du cadre de cette régulation. Régulation qui s’applique uniquement aux fonds conventionnels, définis comme “des billets de banque et des pièces, de la monnaie scripturale et électronique”, mais pas aux transferts de crypto-actifs. 

Proposition de RÈGLEMENT DU PARLEMENT EUROPÉEN

Mais arguant des sempiternels poncifs, mille fois démontés, d’une crypto facilitant les activités criminelles, elle en profite pour proposer des mesures singulièrement restrictives.

Le détail des propositions qui piquent

Alors que la règle générale établit un seuil de 1000 euros à partir duquel s’enclenche la surveillance et la collecte des données relatives à l’expéditeur et au destinataire, cette limite n’existerait pas pour les transactions en crypto.

À cause des caractéristiques spécifiques et du profil de risque élevé des crypto-actifs, l’obligation d’informer devrait s’appliquer quelle que soit la valeur du transfert. 

Proposition de RÈGLEMENT DU PARLEMENT EUROPÉEN

Cette atteinte à la vie privée des utilisateurs s’accompagnerait d’une procédure pesante et coûteuse à respecter pour les acteurs régulés, qui devront non seulement communiquer des informations concernant émetteur et récepteur, mais également des informations sur l’historique des cryptomonnaies ainsi échangées. Et tout cela, sans distinguer comme il est coutume, les transactions suspectes de celles qui ne le sont pas.

Les fournisseurs de services de crypto-actifs devraient aussi obtenir des informations sur la source et la destination de ces crypto-actifs. 

Proposition de RÈGLEMENT DU PARLEMENT EUROPÉEN

Les portefeuilles auto-hébergés dans le collimateur de l’UE

Pire encore, le projet de loi veut aussi appliquer ces nouvelles règles de surveillance aux portefeuilles auto-hébergés. Ainsi, les VASP (fournisseurs de service sur actifs numériques) auront l’obligation d’obtenir les infos personnelles des utilisateurs qui effectuent des transactions depuis ou vers un portefeuille « unhosted« , de les détenir et de les mettre à disposition des autorités compétentes si besoin. Et comme si cela ne suffisait pas, il faudra également qu’ils vérifient « l’exactitude des informations concernant le donneur d’ordre ou le bénéficiaire derrière le portefeuille ».

Un arsenal de règles tout bonnement impossibles à respecter qui pourrait, selon la vigie Patrick Hansen qui a tiré l’alarme sur ces dernières dispositions, avoir des conséquences désastreuses.

(…) la plupart des sociétés de cryptographie ne pourront plus ou ne voudront plus effectuer de transactions avec des portefeuilles non hébergés afin de rester conformes.

Patrick Hansen sur Twitter

Ce 31 mars, la Commission devra se prononcer sur la validité d’une approche aussi punitive, sachant qu’elle devra en passer par une longue et lente procédure typique de l’UE avant d’être définitivement approuvée.

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