DAO – L’arnaque de la décentralisation ?

05 juillet 2022 - 09:00

Temps de lecture : 4 minutes

Par Hugh B.

La question de la décentralisation fait couler beaucoup d’encre dans le secteur des cryptomonnaies. Et elle déclenche actuellement de nombreuses crises existentielles au sein de certains protocoles de la DeFi. Avec des réponses pas toujours très judicieuses, mais une volonté néanmoins commune : s’opposer à une prise de pouvoir unique et centralisée. Une exigence malheureusement pas toujours au centre des principales préoccupations de certains réseaux ou projets. Et une mode qui a vu naître et proliférer les clubs d’investisseurs enregistrés sous l’appellation générique d’Organisations autonomes décentralisées (DAO). Et visiblement, la réalité est (très) loin d’être à la hauteur de l’énoncé…

Tout le monde n’a pas le même degré d’exigence vis-à-vis de la décentralisation du secteur des cryptomonnaies. Pourtant, cette économie numérique n’est rien sans ce principe fondateur et idéologique qui en est à l’origine. Sinon une pâle copie de sa version traditionnelle, avec un petit supplément de blockchain histoire de paraître innovant. Et le risque de devoir rendre des comptes aux instances de régulation, une fois que cette dernière a identifié les leaders ou autres baleines aux commandes.

Un constat bien souvent limité au montant des frais à payer sur le réseau Ethereum. Cela en comparaison de blockchains concurrentes comme Solana (SOL) ou la BNB Chain, gérées par quelques dizaines de validateurs tout au plus. Et une mode qui a frappé le secteur des cryptomonnaies au cours de l’année dernière, avec la prolifération des Organisations autonomes décentralisées (DAO). Des clubs privés d’investisseurs crypto d’un nouveau genre, censés être gérés par la communauté. Mais de toute évidence, les choses ne sont pas si simples…

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En effet, un récent rapport de la structure Chainalysis met en avant le fossé qui sépare la théorie de la pratique dans le domaine. Cela au sujet des 10 structures de type DAO les plus importantes à l’heure actuelle. Et, sans toutefois les nommer, le constat est véritablement choquant. Car la blockchain ne ment pas. Et il est assez simple de déterminer qui possède les jetons de gouvernance censés permettre de maintenir et protéger la décentralisation d’un projet. Et les données recueillies sont sans appel : « dans plusieurs grandes DAOs, moins de 1% de tous les détenteurs détiennent 90% des droits de vote. » Un véritable scandale !

« Bien que ce processus soit souvent décrit comme un moyen de décentraliser le pouvoir, les données des jetons de gouvernance suggèrent que la propriété des DAOs est hautement concentrée. »

Chainalysis

Une situation impossible à concilier avec toute volonté de gestion communautaire. Surtout si l’on considère qu’il faut détenir en moyenne entre 0,1% et 1% de la quantité de jetons en circulation pour pouvoir simplement soumettre une proposition. Et qu’il suffit de posséder entre 1% et 4% de cette offre de cryptomonnaies pour pouvoir la faire aboutir. C’est-à-dire, dans le cas des 10 projets étudiés par Chainalysis, que seul 1 détenteur sur 1000 à 10 000 a suffisamment de fonds numériques pour entrer dans ce processus censé être démocratique. Un constat bien éloigné de la simple volonté d’éviter les flots de propositions inutiles ou malveillantes issues d’un droit d’entrée fixé trop bas…

DAO – Une forte représentation dans la DeFi

Bien évidemment, toutes les structures décentralisées de ce type ne fonctionnent pas nécessairement de la même manière. Et ce sont les principes de gestion liés à la tokenomics interne de chaque projet qui font toute la différence. En particulier sur la question de la quantité de cryptomonnaies nécessaires pour participer à ces processus communautaires. Et dans le domaine tout se complique rapidement.

En particulier si l’on considère leur répartition entre les différents membres et investisseurs, équipe de création incluse. Car ces derniers se gardent bien souvent une part non négligeable – et parfois problématique – du gâteau. Et des accès aux fonds communautaires à l’origine d’affaires comme la prise de pouvoir du fondateur de la plateforme Curve (CRV) en 2020. Car c’est bien dans le secteur de la DeFi que ce genre de structures se rencontrent le plus souvent.

« En termes de chiffres bruts et de taille de trésorerie, les DAOs liées à la DeFi ont une avance très importante. La catégorie DeFi représente 83% de toute la valeur des trésoreries DAO détenues et 33% de toutes les DAOs existantes.« 

Chainalysis

Et le développement actuel de la DeFi met à rude épreuve ce genre de structures jusque là très intimistes. Avec l’arrivée d’investisseurs institutionnels ou de fonds de capital risque en mesure de racheter une quantité (trop) importante de cryptomonnaies en relation à un seul projet. Et de ce fait en possession du pouvoir suffisant pour court-circuiter le processus communautaire à leur seul et unique avantage.

Raison pour laquelle certains protocoles tentent de lancer des procédures parfois hasardeuses pour essayer de s’opposer à ce genre de dérives de plus en plus courantes. Avec une certitude à l’heure actuelle : il s’agit là du seul véritable risque auquel la DeFi va devoir s’empresser de trouver une réponse ferme et appropriée de toute urgence ! Une affaire à suivre de très près…

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