Discorde régulatrice autour de l’ETH pointé comme titre financier par l’autorité de New York

Marché rouge sang pour les cryptos au milieu d’une avalanche de nouvelles dévastatrices dont celle concernant l’ether (ETH) qui, pour la première fois, est officiellement assimilé à un titre financier (security). C’est la redoutable procureure générale de New York (NYAG) qui s’y est collée lors de la procédure qu’elle a lancée contre l’exchange KuCoin. Une allégation devant un tribunal qui vient contrarier les dernières affirmations de la CFTC, mais qui vient conforter celles de la SEC. Le Congrès seul pourrait trancher en faveur de l’une ou de l’autre instance de régulation mais ne semble toujours pas pressé de le faire, préférant laisser régner un désordre préjudiciable à une industrie crypto déjà exsangue de toutes les épreuves traversées.

10 mars 2023 - 11:12

Temps de lecture : 4 minutes

Les débats autour de la catégorisation juridique des cryptomonnaies, et plus particulièrement de l’ether, ont pris un nouveau tournant ces dernières heures. Pour la première fois, un régulateur prétend devant un tribunal que la deuxième crypto du marché est un titre financier. Et s’en vante selon le communiqué émanant du bureau de New York, rendant compte de l’action intentée contre la populaire plateforme d’échange KuCoin.

L’Ether entre dans la catégorie des titres financiers selon l’autorité régulatrice de New York

Dans les faits, la plainte, déposée le 9 mars devant la Cour suprême de l’État du comté de New York, allègue que KuCoin, basé aux Seychelles, a violé la loi sur les valeurs mobilières. Il lui est notamment reproché d’avoir proposé à la vente des jetons qui répondent à la définition d’un titre sans s’être préalablement enregistré auprès du bureau du procureur général. Le grief n’est pas nouveau, la procureure Letitia James avait déjà sorti les crocs pour le même motif à plusieurs reprises. En revanche, ce qui est inédit, c’est qu’elle cite nommément l’ether comme titre financier vendu illégalement et curieusement aux côtés du stablecoin UST, porté disparu depuis bientôt un an.

Cette action est l’une des premières fois qu’un régulateur prétend devant un tribunal que l’ETH, l’une des plus grandes crypto-monnaies disponibles, est un titre. La pétition fait valoir que l’ETH, tout comme LUNA et UST, est un actif spéculatif qui s’appuie sur les efforts de développeurs tiers afin de générer des bénéfices pour les détenteurs d’ETH. Pour cette raison, KuCoin devait s’enregistrer avant de vendre ETH, LUNA ou UST.

Communiqué du NYAG

A l’appui de sa certitude, elle avance plusieurs arguments.

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Plaidoirie de la juridiction de New York pour un ETH à étiqueter comme titre financier

D’abord le fait que l‘ETH a été initialement distribué aux premiers partisans et investisseurs en 2015 dans le cadre d’un ICO (levée de fonds fonctionnant via l’émission d’actifs numériques), et que son infrastructure est maintenue par un groupe relativement restreint de contributeurs.

Dans la foulée, elle pointe l’influence exercée par le co-fondateur d’Ethereum, Vitalik Buterin et la Fondation Ethereum, considérant que seul un « petit nombre de développeurs » contrôlent la blockchain et profitent à plein « de la croissance du réseau et de l’appréciation connexe de l’ETH », ayant reçu des quantités importantes de jetons lors de l’ICO et qu’ils « conservent des participations importantes dans cet ETH aujourd’hui ».

La poursuite fait également valoir des documents datant de l’époque de l’offre initiale pour appuyer la symétrie avec une intention d’enrichissement propre aux securities sur le territoire US. Et le passage d’Ethereum de la preuve de travail (PoW) à la preuve d’enjeu (PoS) a de son point de vue accentué le phénomène, les utilisateurs pouvant désormais gagner des récompenses financières en détenant de l’ETH.

Depuis la transition vers le consensus de preuve de participation, la possession d’ETH se traduit directement par un potentiel de profit en gagnant des récompenses de jalonnement.

Rapport du NYAG

Discorde au sein des régulateurs US

Si Letitia James semble sûre de son fait, rejoignant la conviction du patron de la Securities and Exchange Commission (SEC), qui lui l’a toujours joué de façon plus retorse en refusant obstinément de qualifier juridiquement l’Ether, mais en affirmant ouvertement que seul Bitcoin était à classifier en tant que matière première numérique (commodity), la concorde entre régulateurs sur ce sujet-là n’est pas acquise.

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En effet, Rostin Behnam, le responsable de la Commodity Futures Trading Commission (CFTC) qui ne semble plus savoir à quel saint se vouer, vient d’opérer un nouveau revirement. Il a déclaré mercredi lors d’une audience à la Commission sénatoriale de l’agriculture que l’ETH était bien une marchandise, et non un actif financier.

Nous n’aurions pas permis au produit – dans ce cas, le produit à terme d’ether – d’être coté sur une bourse CFTC si nous n’avions pas fortement estimé qu’il s’agissait d’un actif de base parce que nous avons un risque de litige, nous avons un risque de crédibilité d’agence si nous le faisons quelque chose comme ça sans défense légale sérieuse pour soutenir notre argument selon lequel cet actif est une marchandise.

Rostin Behnam

Une catégorisation qui pourrait impacter la majorité des cryptos

Voilà l’industrie crypto US encore bien avancée, elle qui n’en finit plus de réclamer de la clarté face à la confusion que font régner des régulateurs en désaccord, va encore pouvoir souffrir mille morts, le mot de la fin se faisant inlassablement attendre. Rappelons pour la bonne compréhension des enjeux que les Etats-Unis sont un des seuls pays au monde doté d’une double autorité de régulation pour suivre les actions et les dérivés. Dans la plupart des autres, les compétences fusionnent en une seule et même instance. Cette spécificité on le voit, n’est pas forcément garante d’efficacité, les deux instances de régulation majeures se livrant à un bras de fer épique pour prendre la main sur le contrôle du marché crypto.

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L’intervention du bureau de New York, dont l’encadrement législatif des cryptos est l’un des plus rigoristes, va peut-être précipiter l’exigence d’une classification claire. Toute seule, elle ne fera pas basculer la balance, mais ouvertement soutenue par la SEC, la probabilité augmente. En ce cas, l’industrie crypto aux Etats-Unis devra faire face à des problématiques juridiques quelque peu inextricables. En effet, s’il est admis que l’ether est un titre, l’écrasante majorité des cryptos le seront aussi. Ce qui revient à dire qu’elles ne peuvent être légalement vendues au public que sous certaines conditions. A savoir, si l’émetteur s’est préalablement enregistré auprès de la SEC et adhère à un régime de divulgation strict. De fait, la plupart d’entre elles se retrouveraient dans l’illégalité avec les conséquences que l’on peut imaginer.

S’il en reste un… ce sera Bitcoin

Mais le débat réglementaire n’en est pas encore à sa conclusion. Et les partisans nombreux qui pensent que ETH ressemble plus à une marchandise qu’à un titre, étant donné son utilisation comme jeton utilitaire au sein de l’écosystème Ethereum, ne vont pas lâcher la lutte si facilement. D’autant qu’à leurs yeux, si ether est une cible pour la SEC et plus généralement pour les autorités US, c’est pour démanteler un marché dont beaucoup de jetons reposent sur la deuxième blockchain du secteur. Ne resterait plus alors, ou à peu près, que Bitcoin, conformément au voeu de Gary Gensler qui le situe résolument à part.

En attendant si le prix de l’ether a subi une forte correction, de -8,3% sur 24 heures, celui du bitcoin le suit de près avec -7,9%. Rien d’étonnant, l’industrie crypto connaissant une énième séquence cauchemardesque avec une salve de nouvelles plus sombres les unes que les autres.

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