Les cryptos encore menacées d’interdiction en Inde

01 février 2021 - 07:26

Temps de lecture : 3 minutes

La communauté crypto en Inde est de nouveau sur la sellette depuis l’annonce inattendue d’un projet de loi censé aider à la création d’une monnaie numérique souveraine par la Banque de réserve de l’Inde (RBI). Pour favoriser l’émergence de cette roupie version 2.0, la loi interdirait toutes « les cryptomonnaies privées ».

Nouvelle menace d’interdiction en Inde

La communauté crypto en Inde ne connaît pas la sérénité. Certes, cette dernière année elle avait retrouvé du souffle après que la Cour suprême avait annulé l’interdiction faite aux banques d’opérer des transactions avec les exchanges de crypto-actifs. Les entreprises locales avaient relancé leurs activités. Les grandes bourses mondiales comme Binance, OKEx ou Kraken avaient repointé le bout de leurs plateformes. Bref, un vent d’optimisme avait balayé le sous-continent indien malgré une réglementation encore confuse et incertaine.

L’annonce de vendredi est donc venue de nouveau jeter un froid polaire sur l’écosystème et sa renaissance fragile. Le gouvernement a en effet déclaré que le Parlement indien examinera un projet de loi visant à interdire les cryptomonnaies « privées » lors de sa prochaine session budgétaire. Étant donné que le parti autoritaire au pouvoir contrôle les deux chambres du Parlement, les chances d’adoption du projet de loi sont grandes. Mais, comme usuellement en lnde quand il s’agit de cryptomonnaies, les termes employés par le gouvernement sont ambigus, sujets à interprétation tendancieuse.

Le but de ce projet de loi est de créer un cadre facilitant la création de la monnaie numérique officielle qui sera émise par la Bank of India. Le projet de loi vise également à interdire toutes les crypto-monnaies privées en Inde. Cependant, il autorise certaines exceptions pour prendre en charge la technologie sous-jacente de la crypto-monnaie et ses utilisations. »

Une hostilité à l’égard des cryptos appelée à se généraliser ?

Autrement dit, il semblerait qu’il s’agit pour le gouvernement de faire place nette et d’éliminer les cryptomonnaies qui ne relèvent pas du supposé pouvoir régalien de l’Etat. En d’autres termes, seule une monnaie numérique émise par la banque centrale (CBDC) sera autorisée. Les autres étant considérées comme des concurrentes illégitimes à cette version 2.0 de la roupie nationale en préparation. On peut donc imaginer que Bitcoin et consorts échappant au monopole de l’Etat sont bel et bien visés. Même si à l’opposé d’une prétendue « crypto privée », Bitcoin est public et décentralisé et de fait, impossible à interdire.

Mais quoi qu’il en soit, cette nouvelle offensive du gouvernement indien suscite bien des angoisses. Elle augure aussi peut-être une hostilité plus générale des autorités face à la montée en puissance (et en capitalisation) de Bitcoin et consorts. Car l’Inde n’est ni la première ni la seule à vouloir lancer une version numérique de sa monnaie souveraine.

Tous les pays ou presque s’y sont mis (85% d’entre eux selon le dernier rapport de la BRI) et les dernières paroles officielles distillées à l’encontre de Bitcoin, systématiquement dénigré et associé à des allégations mensongères, font monter d’un cran les menaces d’étouffement.

Effet répressif, effet contre-productif ?

De façon surprenante, Ray Dalio, « le Steve Jobs de l’investissement », longtemps critique sur Bitcoin et lui reconnaissant désormais des qualités irremplaçables, le hissant notamment au rang de « sacrée invention », s’en est fait l’écho. Il explicite son point de vue dans une note intitulée « What I Really Think of Bitcoin ».

J’ai du mal à imaginer qu’ils laissent le bitcoin (ou l’or) être un choix nettement meilleur que l’argent et le crédit qu’ils produisent. Je pense que le plus grand risque du bitcoin est son succès, car s’il réussit, les gouvernement essaieront de le tuer et ils ont beaucoup de pouvoir pour y parvenir ».

Ray Dalio, What I Really Think of Bitcoin

On peut effectivement penser qu’une régulation renforcée sinon répressive va se mettre en place pour compliquer l’accès aux cryptomonnaies décentralisées. Mais quelles que soient les mesures adoptées, les Etats ne pourront pas les éliminer. On peut même envisager qu’un arsenal législatif plus sévère viendrait au contraire alimenter encore davantage la révolution Bitcoin.

En attendant, le projet indien n’est pas encore une loi. Et la question est de savoir si l’Inde prendra le risque de devenir la première grande économie asiatique à prendre le chemin illusoire mais très contraignant de l’interdiction.

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