Les stablecoins sous haute surveillance

02 novembre 2021 - 11:00

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Très attendu, le voilà enfin publié. Le rapport de l’administration américaine sur les stablecoins préconise que les émetteurs de cryptomonnaies adossées à parité avec une monnaie fiduciaire soient, comme les banques, soumis à une surveillance fédérale stricte. Les fournisseurs de portefeuilles dépositaires également. Le Congrès devrait aussi, selon le rapport, promulguer une législation donnant à un régulateur fédéral le pouvoir de superviser les pièces stables.

Une concertation massive en faveur d’un modèle bancaire

Les stablecoins sont sous le radar des autorités américaines depuis déjà longtemps en raison des risques systémiques qu’ils font peser sur le système financier. L’opacité régnant autour des avoirs de leurs réserves s’affiche au rang premier des préoccupations, avec la menace d’une ruée qui pourrait provoquer un cataclysme. Un danger d’autant plus envisageable que l’offre des stablecoins connaît une croissance exponentielle. Sa capitalisation boursière atteint aujourd’hui quelques 138 milliards de dollars.

De fait, le rapport publié lundi répond à une vive attente. Elaboré par un consortium d’agences fédérales dont la Securities and Exchange Commission (SEC), la Réserve fédérale (Fed), la Commodity Futures Trading Commission (CFTC) et le département du Trésor mais également des régulateurs bancaires comme la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC) et le Bureau du contrôleur de la monnaie (OCC), il appelle le Congrès à adopter des lois qui contraindraient les émetteurs de stablecoins à devenir des « institutions de dépôt assurées ». Autrement dit, des entités semblables à des banques. Le but : protéger les dépôts des clients et limiter « tout impact systémique négatif potentiel en cas de faillite bancaire ».

Un équilibre financier précaire

Si cette loi était adoptée, elle entraînerait un changement majeur pour certains émetteurs de stablecoin. En effet, elle imposerait des restrictions sur les types de garanties utilisées pour soutenir leurs jetons. En outre, elle supposerait un fonctionnement beaucoup plus coûteux rien qu’en frais de conformité, d’assurance, d’audits et d’autres procédures liées au fait d’être une banque.

Une situation dommageable pour des entreprises qui tirent souvent une grande partie de leurs revenus des intérêts qu’elles gagnent sur leurs réserves. Or, à un moment où les rendements des comptes bancaires et des bons du Trésor sont proches de zéro, leur équilibre financier serait mis en péril par des frais supplémentaires. D’autant plus, qu’à la différence des établissements bancaires traditionnels, elles n’ont pas d’activités lucratives comme les prêts.

Pas d’instance de régulation spécifique dédiée aux stablecoins

Décrivant, dans un point presse rapporté par TheBlock, les stablecoins comme « un produit complexe à multiples facettes avec un ensemble complexe de risques à multiples facettes », le rapport préconise d’utiliser l’autorité existante pour les encadrer. Il n’y aura donc pas, pour le moment, la création d’une unité de régulation dédiée à cette classe d’actifs. Précisons encore que la législation ne s’appliquerait qu’aux émetteurs de pièces stables qui ont leur siège social aux Etats-Unis ou/et qui exploitent des stablecoins accessibles aux résidents US.

Il est à noter qu’un certain nombre d’acteurs de l’espace crypto ont contribué aux discussions. Au premier rang desquels figurent les deux leaders du marché des stablecoins. Tether (USDT) et USD Coin (USDC), particulièrement visés par l’offensive régulatrice à l’oeuvre.

En effet, ils ne sont ni l’un ni l’autre émis par des sociétés réglementées par le gouvernement fédéral même si dans le cas de l’USDC, Coinbase et Circle, ses deux instances émettrices, sont chapeautées par le New York Department of Financial Services.

Les régulateurs sifflent la fin de la récré

Le document de 26 pages exhorte également le Congrès à exiger que les fournisseurs de portefeuilles de garde qui offrent spécifiquement des services de stablecoin soient réglementés par une agence fédérale. Il l’encourage aussi fermement à promulguer une législation donnant à un régulateur fédéral le pouvoir de superviser les pièces stables.

Le rapport indique qu’en l’absence d’action du Congrès, le Conseil de surveillance de la stabilité financière (le Financial Stability Oversight Council (FSOC)), qui comprend tous les membres du groupe de travail, prendra la main. Un conseil créé après le krach boursier de 2008 pour éviter de futurs effondrements.

«La croissance rapide des pièces stables augmente l’urgence de ce travail. L’inaction risque d’augmenter le nombre de pièces de paiement stables sans une protection adéquate pour les utilisateurs, le système financier et l’économie en général. En revanche, un cadre réglementaire qui soutient la confiance dans les pièces de paiement stables, en temps normal et en période de stress, pourrait augmenter la probabilité que les pièces stables soutiennent des options de paiement avantageuses. »

Rapport sur les stablecoins

Parallèlement à la publication de ce rapport, les stablecoins font l’objet d’un bras de fer entre la SEC et la CFTC. Les préconisations avancées ne semblent pas vraiment définir clairement les rôles dévolus à chacun. Le gendarme financier et le régulateur du marché des matières premières n’en ont visiblement pas fini avec leurs passes d’armes.

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