Couperet imminent pour les exchanges crypto en Corée du Sud

14 septembre 2021 - 10:57

Temps de lecture : 3 minutes

Les plateformes d’échange crypto ont jusqu’au 24 septembre pour se mettre en conformité avec la nouvelle réglementation en vigueur en Corée du Sud. A défaut, elles se verront dans l’obligation de plier bagages ou de mettre la clé sous la porte. Une perspective plutôt sombre qui s’explique par un contexte local singulier sur lequel nous revenons.

L’écosystème crypto coréen sur le grill

Il fut un temps, désormais révolu, où la Corée du Sud pouvait apparaître comme un pays singulièrement accueillant envers les cryptomonnaies. Une innovation somme toute bienvenue, à considérer avec bienveillance. Las, c’était sans compter sur les régulateurs locaux qui se montrent particulièrement interventionnistes.

Au fil du temps, ils ont resserré de façon drastique les conditions d’existence d’un écosystème qui a de moins en moins les moyens d’assurer sa survie. Ainsi, les dernières dispositions des instances de surveillance financière vont probablement contraindre la grande majorité des plateformes locales à fermer.

En effet, celles-ci ont jusqu’au 24 septembre pour s’enregistrer auprès de la Commission locale des services financiers (FSC). Mais, ce qui pourrait apparaître comme une simple formalité est en fait une procédure complexe et coûteuse que la plupart d’entre elles ne peuvent assumer.

Surtout, pour répondre aux exigences du régulateur, elles sont dans l’obligation de détenir un compte bancaire, en « nom réel » et non au titre de la société, domicilié en Corée du Sud. Après tout, pourquoi pas… mais encore faut-il que les banques commerciales du cru y mettent un peu du leur. Or, ces dernières – et elles ne sont pas les premières si on se fie à l’exemple français proprement kafkaïense montrent plutôt timorées quand il s’agit de cryptos. Elles n’accordent leurs services qu’aux mastodontes déjà bien en place. A savoir : Bithumb, Coinone, Korbit et Upbit qui concentrent à elles-seules 90% du volume des transactions crypto.

Les autres, nombreuses, n’ont ni le poids ni la légitimité nécessaires pour obtenir le soutien d’institutions structurellement allergiques au risque mais pas très regardantes sur la protection des utilisateurs… Upbit et Bithumb s’étant déjà fait hacker. De fait, la situation est telle, qu’au bout du compte, ce sont les banques qui ont le droit de vie ou de mort sur un crypto-exchange.

Une nervosité régulatrice qui ne vient pas de nulle part…

Si la Corée du Sud a pris un virage réglementaire particulièrement sévère avec des régulateurs n’hésitant pas à user du registre de la menace, ce n’est pas par simple plaisir de sévir. En effet, le pays a connu nombre de péripéties avec le piratage répété de plateformes, la multiplication de faux échanges et de fraudes en tout genre.

De fait, les mesures adoptées sont, selon la FSC, une réponse à la demande des investisseurs qui réclament que leurs fonds soient mieux protégés. Car oui, les Coréens du Sud ont assez précocement manifesté un intérêt pour les cryptomonnaies, les jeunes notamment en butte à une société qui ne sait leur assurer un avenir digne de ce nom, en usant et abusant parfois d’outils redoutables comme les effets de levier et le trading sur marge. De fait, certains se sont retrouvés sur la paille, étranglés par des emprunts qu’ils avaient contractés pour « miser » sur les cryptos.

Dans un tel contexte, le régulateur ne s’est pas contenté de taper du poing sur la table. Il a commencé à mettre en place un système de surveillance, reposant notamment sur des interdictions. Ainsi, après avoir interdit les ICO (Initial Coin Offering) en 2019, ce sont les cryptomonnaies dites anonymes (Monero, Dash, Zcash) qui ont fait l’objet d’un anathème sans retour.

Couperet imminent et concentration délétère

L’ultimatum imposé aux bourses d’échange crypto participe de la même volonté d’assainir un marché dont on ne retient que les excès. Mais, le mieux étant l’ennemi du bien, on observe que le modèle qui se profile dans l’industrie crypto sud-coréenne est en passe de reproduire celui de l’économie traditionnelle. Un système fermé qui repose sur un groupe de 64 conglomérats familiaux , les « chaebols », représentant 84% du PIB (chiffre 2019 du Korea CXO Institute) mais pourvoyeur de seulement 10% d’emplois.

Il est d’ailleurs à noter que les plateformes d’échange crypto étrangères n’échappent pas à la règle. Elles devront également obtenir une licence pour pouvoir continuer de dispenser leurs services aux Sud-Coréens à partir du 25 septembre prochain. Binance qui est devenu, par la force des choses, particulièrement réactif aux soubresauts réglementaires, a pris les devants. La plateforme a suspendu jusqu’à nouvel ordre le won de ses paires de trading.

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