Les stablecoins dans le viseur des instances du G20
15 avril 2020 - 17:00
Temps de lecture : 3 minutes
Par Hugh B.
La tendance actuelle est à la régulation de l’univers des cryptomonnaies. Est-ce en lien avec la crise économique actuelle ? Dans tous les cas, les positions se durcissent et s’affinent au fur et à mesure que les législateurs comprennent les enjeux de cet univers et de ses solutions monétaires décentralisées. Les stablecoins sont en ligne de mire. Et ça ne sent pas bon du tout…
L’information est apparue sur Twitter hier soir. Grégory Raymond, journaliste et amateur de cryptomonnaies, expose en détail dans un long thread les implications des dernières recommandations du G20 au sujet des stablecoins.
Il s’agit d’un rapport consultatif publié hier sur le site du Financial Stability Board (FSB). Un groupement économique international créé en 2009 dans le cadre d’une réunion du G20. Ce n’est pas sa première prise de position inquiétante sur le sujet des monnaies numériques.
Les stablecoins en mauvaise posture
Ce document incite les autorités compétentes à mettre en place des mesures permettant l’interdiction pure et simple des stablecoins lorsqu’ils n’entrent pas dans le cadre des exigences réglementaires de leurs juridictions. Pour cela, le FSB conseille la mise en place d’une coûteuse licence pour les émetteurs de ce type de monnaies numériques. Cela revient en résumé à réserver le droit d’émettre des stablecoins aux seules banques.
Comme le souligne Grégory Raymond, cela est un coup dur pour MakerDAO et son DAI. Alors même qu’il a actuellement du mal à se relever de la violente chute des cours qui a eu lieu mi-mars. De telles dispositions pourraient provoquer à terme la mort pure et simple de la DeFi. Surtout dans le cas d’une exigence de gouvernance identifiée qui se résume à poser la question classique de « qui est le responsable ici ? » Une question à laquelle l’univers décentralisé des cryptomonnaies ne peut par définition pas répondre.
Seuls des acteurs importants pourraient supporter de telles mesures, comme l’USDC de Coinbase ou le futur Libra, qui n’a pas dit son dernier mot et pourrait surfer sur cette vague réglementaire.
Un retour possible du Libra
Selon l’économiste et universitaire John Vaz, le Libra n’est pas mort. Et les récentes propositions du FSB semblent lui ouvrir une voie toute tracée vers le succès. Car en fait, elles dessinent tout simplement un univers qui ne sera accessible qu’aux grands groupes où aux banques capables de répondre aux exigences coûteuses de mise en conformité. Et il semble que cela soit l’angle d’attaque du Libra actuellement. Ce que John Vaz appelle un « cauchemar réglementaire », mais qui n’est en rien une abdication.
« Ils ciblent (Facebook, NDLR) un marché prêt à l’emploi dans le sens où les gens font déjà des transactions sur Facebook, Messenger, WhatsApp et Instagram. » – John Vaz
John Vaz pense qu’à terme, le projet de stablecoin de Facebook est celui qui a le plus de chance de voir le jour. Il bénéficie d’un réseau existant et de la force de frappe de l’un des leaders des BigTechs.
CBDC vs stablecoins
John Vaz explique que selon lui, les monnaies numériques de banques centrales (CBDC) n’entreront pas en concurrence directe avec les cryptomonnaies et les stablecoins. Mais il souligne également que ces mêmes banques centrales n’aiment pas du tout ces monnaies indépendantes et décentralisées qui sont hors de leur contrôle monétaire. Un sentiment partagé par la quasi-totalité des instances de régulation du monde. Il suffit de voir les problèmes auxquels fait face le projet de cryptomonnaie GRAM de Telegram, en ce moment même.
Selon John Vaz, les CBDC ne sont pas du tout construites sur le même modèle que les cryptomonniaes. Car elles reposent plus sur « une volonté de suivi de l’argent que sur la fourniture d’avantages ». Un fait indéniable, mais qui n’annule en rien la volonté qui semble s’affirmer de vouloir contrôler fermement ou détruire les projets de stablecoins privés.
La crise économique actuelle semble préciser tout autant que précipiter les choses dans le domaine de la régulation des cryptomonnaies. Les rapports pleuvent et se ressemblent tous. Entre augmentation de la surveillance et prise de contrôle, la cryptosphère a de quoi avoir des sueurs froides. Difficile de savoir si cette volonté affirmée de régulation n’est pas tout simplement une stratégie pour museler des concurrents potentiels dans le cadre du développement des monnaies stables de banques centrales. Une tentative à peine voilée de conserver la main-mise sur la création et la gestion de monnaies, centralisées et contrôlées par les instances bancaires et gouvernementales.
Espérons que les organes de surveillance mettront autant d’énergie à surveiller la mauvaise utilisation de leurs CBDC qu’elles en mettent actuellement à surveiller les cryptomonnaies.
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