Bitcoin – La très politique cryptomonnaie apolitique

Le conflit engagé par la Russie en Ukraine remet sur le devant de la scène les instabilités géopolitiques inhérentes aux crises économiques mondiales. Car même s’il n’est pas forcément voué à s’effondrer aussi tôt que certains le souhaitent, le modèle financier actuel est malade. Avec comme preuve évidente, sa température montée d’un cran historique avec des taux d’inflations records. Une réalité face à laquelle le Bitcoin (re)devient une alternative évidente. Avec en parallèle ce débat aussi nécessaire que redondant : est-il possible et souhaitable d’utiliser cette cryptomonnaie à des fins politiques ?

28 février 2022 - 09:00

Temps de lecture : 5 minutes

Par Hugh B.

Mais avant de commencer cet article, une petite précision semble s’imposer. Lorsqu’un candidat à l’élection présidentielle parle des cryptomonnaies, cela n’entre pas dans le cadre de ce questionnement politique. Il s’agit juste de racolage, en mode page de publicité saisonnière et opportuniste d’un goût douteux. Car ce n’est pas parce que Mc Do explique que son Happy Meal contient tout ce qu’il faut pour grandir que cela est la vérité. Il faut le tester pour être sûr. Ou (surtout) pas !

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Et dans le cas présent, il est question de choses plus sérieuses et essentielles. À savoir, comment aborder la situation et les mutations actuelles du Bitcoin ? Ce dernier passé en l’espace de quelques années de moyen de paiement du darknet à monnaie officielle du Salvador. Et depuis peu, comme une véritable arme écopolitique au sein du conflit qui frappe l’Ukraine. Avec en parallèle, cette interrogation récurrente tout de suite beaucoup plus sensible : peut-on inscrire cette cryptomonnaie historiquement « apolitique » dans des démarches politiques avérées ?

Politique vs apolitique – Où se situe le Bitcoin ?

Et pour comprendre le caractère (a)politique du Bitcoin, il est tout d’abord nécessaire de s’attarder quelques instants sur la notion même de « politique. » Un mot nettoyé de toute sa symbolique par des partis et des élections devenues de simples simulacres de démocratie. Car un candidat peut accéder au pouvoir avec moins de 25% de votes exprimés. Cela tout en ignorant volontairement un abstentionnisme provoqué et entretenu par un vide de sens et une absence de comptabilisation des votes blancs. Car ne pas aller voter n’a rien à voir avec le fait d’aller voter, mais en faisant le choix de ne rien mettre dans l’enveloppe. Et de ce fait, le vote blanc est un acte résolument politique.

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Il n’est pas question ici de prendre parti – ou de juger – pour ou contre une décision de vote, quelle qu’elle soit. Mais bien de comprendre que la politique politicienne n’est pas la seule politique possible, fort heureusement. Car chacun de nos actes s’inscrit dans une dynamique spécifique aux conséquences sociales. Acheter tel type de voiture, de nourriture. Se comporter de telle manière avec les femmes, les étrangers, les animaux. Et choisir d’acheter du Bitcoin ou des cryptomonnaies basées sur le principe de décentralisation. Car tout est politique, même si l’objet utilisé pour ce faire est présenté comme apolitique.

Bitcoin – Une monnaie apolitique ?

La véritable différence est que le Bitcoin n’appartient pas à un mouvement politique, n’en déplaise aux libertariens qui en revendiquent bien souvent la propriété. Car il peut indifféremment être utilisé par les anarchistes pour son caractère autonome vis-à-vis des instances de pouvoir. Ou se retrouver à circuler dans les rangs de nationalistes désireux d’effectuer des échanges de valeur pseudonymes et/ou sans avoir à passer par des banques. Mais également des traders et autres investisseurs dont le but est uniquement de réaliser des profits importants en surfant sur sa volatilité légendaire. Et enfin, les emblématiques hackers et autres amateurs du darkweb, en quête d’un moyen de paiement intraçable ou en tout cas impossible à bloquer.

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Car le Bitcoin a été créé pour être une monnaie accessible à tous, mais n’appartenant à personne et sans restrictions possibles. Une réalité qui prend tout son sens dans des pays où la pauvreté s’accompagne d’une politique monétaire souvent désastreuse. Et un intérêt souvent incompris par les investisseurs des pays riches, heureux de critiquer leur système financier tout en bénéficiant de son apparente stabilité. Car c’est plus certainement sur des territoires comme l’Afrique que cette révolution est en marche. Là où aucun déterminisme monétaire ne peut réellement s’opposer à son adoption grandissante.

Est-ce que cela fait du Bitcoin une monnaie libertarienne, anarchiste, nationaliste ou simplement capitaliste ? Non ! Pas plus qu’il ne deviendra la seule monnaie du Salvador ou des pays en voie de développement. Car le Bitcoin est l’outil de la liberté, et cette dernière n’a de sens que s’il est impossible à enrayer. Une capacité certes apolitique, mais dont la mise en pratique et l’utilisation sont définitivement politiques !

Bitcoin – Quelle place dans le conflit actuel ?

Et tout cela nous amène à la situation actuelle, qui ébranle le monde depuis les frontières récemment remises en question de l’Ukraine. Car pendant que la Russie s’invite sur un territoire qu’elle revendique, la communauté internationale s’oppose à cette violation géographique. Et en parallèle d’une opération terrestre aux conséquences désastreuses, une véritable guerre monétaire s’engage. Cela, par exemple, sous la forme d’une volonté d’exclure la Russie du réseau international de messagerie bancaire et financière SWIFT. Mais avec une spécificité historique de taille : le Bitcoin comme trublion apolitique de ce conflit naissant.

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Car les sanctions économiques prises sont saluées par certains, mais craintes par d’autres. En particulier car cela pourrait signifier un basculement monétaire d’envergure vers des solutions comme le yuan numérique chinois qui n’attendait que ce genre d’occasion pour se développer. Et par ricochet, un affaiblissement possible du dollar qui n’aurait rien de très heureux pour l’économie mondiale, dans la situation actuelle déjà chaotique. Mais pourquoi pas également une utilisation du Bitcoin pour contourner ces sanctions. En particulier si l’on considère que la banque centrale de Russie se posait la question de faire des cryptomonnaies de simples devises il y a tout juste quelques semaines…

Bitcoin – Pro-Ukraine ou anti-Russe ?

Et depuis le début du conflit en Ukraine, les initiatives se multiplient afin de soutenir la population et les combattants de ce pays. Cela sous la forme de donations en bitcoins et autres cryptomonnaies à destination de portefeuilles officiels. Mais d’autres opérations ont déjà permis de lever des millions de dollars à peine quelques jours après le début des hostilités. Et cela afin de soutenir des organisations non gouvernementales ou des centres de secours. Mais également la lutte armée organisée contre cette invasion russe.

Tout cela sur fond d’une hausse sans précédent des volumes de transaction enregistrés par les exchanges de cryptomonnaies locaux. Une réalité sans aucun doute liée aux limitations de retraits bancaires imposées par le gouvernement ukrainien. Mais également à la chute importante de la valeur de la devise nationale hryvnia (UAH). Car le Bitcoin sert à réaliser des donations en soutien à la population ukrainienne, tout en permettant à cette dernière de sécuriser ses fonds face à la situation actuelle. Mais ce n’est pas tout.

Car dans le même temps, le vice-président ukrainien a demandé hier aux plateformes d’échange de cryptomonnaies de bloquer leurs utilisateurs russes.

« Je demande à tous les principaux échanges de cryptomonnaies de bloquer les adresses des utilisateurs russes. Il est crucial de geler non seulement les adresses liées aux politiciens russes et biélorusses, mais aussi de saboter les utilisateurs ordinaires.« 

Mykhailo Fedorov, vice-Président ukrainien

Une requête qui peut se comprendre, dans la situation de tension actuelle. Mais qui va à l’encontre même de l’élan de générosité dont l’Ukraine a bénéficié depuis quelques jours. Car la liberté des uns ne peut pas se construire sur une interdiction imposée aux autres. Et même si la Russie venait à utiliser le Bitcoin pour contourner les sanctions internationales, serait-il légitime de l’en empêcher ? Une question qui ne se pose même pas, puisque c’est techniquement impossible…

Un véritable casse-tête pour certains, qui pensent voir dans cette situation une incompatibilité idéologique (politique ?). Mais c’est peut-être tout simplement du fait de l’utilisation d’une unité de mesure qui n’est pas la bonne. Car le Bitcoin n’est pas une monnaie de banque centrale, contrôlable et censurable. Il s’agit d’un outil apolitique développé pour servir une destination unique et éminemment politique : la liberté monétaire. Rien de moins, mais rien de plus !

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