Uniswap Labs restreint l’accès à plus de 100 jetons pour des raisons réglementaires

24 juillet 2021 - 09:00

Temps de lecture : 4 minutes

Par Hugh B.

Dans la saga immuable qui oppose les cryptomonnaies aux instances de régulation, une nouvelle saison est en train de voir le jour. Et fait surprenant, cela touche l’univers pourtant décentralisé de la DeFi censé échapper à tout contrôle de ce type. Une actualité qui concerne plus particulièrement la structure en charge du développement de la plateforme leader des DEXs qu’est Uniswap (UNI). Cela dans le cadre d’une suppression « réglementaire » de certains jetons jusque là disponibles sur l’interface dont elle a la gestion. Une première dans le secteur qui va de toute évidence marquer un tournant pour l’avenir de cette finance décentralisée.

Cela fait des années que les instances de régulation comme la Security and Exchange Commission américaine traquent sans relâche les acteurs de l’univers des cryptomonnaies. Avec dans un premier temps comme raison dans le viseur les Initial Coin Offering (ICO) de 2017. Mais plus récemment face à la prolifération de ces jetons permettant une exposition tokenisée ou synthétisée à des actions classiques. Offre à laquelle vient de renoncer la plateforme Binance au cœur d’une tempête réglementaire devenue internationale. Et qui semble également frapper Uniswap.

Car la technique de chasse de la SEC est identique à celle d’un prédateur aux aguets. Et qui attaque chaque proie qui a la mauvaise idée de s’éloigner un peu trop du troupeau de la décentralisation. Ce qui a été la principale raison de ses attaques contre le projet Ripple (XRP) jugé trop centralisé. Mais qui offrait surtout une structure légale et identifiable à attaquer, au contraire du Bitcoin et d’Ethereum (entre autres). Et il semble que cette technique soit en train de s’appliquer à la DeFi. Car aussi décentralisée soit-elle, ses protocoles restent bien souvent sous gestion de laboratoires (Labs) qui en accompagnent le développement.

SEC vs DeFi – Comment imposer une régulation sur un système décentralisé ?

Uniswap Labs coupe l’accès à plus de 100 jetons

Car la structure Uniswap Labs en charge du développement du DEX du même nom vient d’annoncer qu’elle sélectionnera dorénavant les jetons disponibles sur son interface. Un classement VIP en mode videur de boîte de nuit qui ne ressemble pas à l’esprit de la DeFi. Et dont les consignes sont de faire respecter « l’évolution du paysage réglementaire ». Ce qui doit de toute évidence être lu entre les lignes comme : la SEC nous surveille alors on fait le ménage. Le tout très certainement en relation aux récentes déclarations peu engageantes du président de cette instance de régulation plus mondiale que simplement américaine.

« Ne vous méprenez pas : peu importe qu’il s’agisse d’un jeton d’action, d’un jeton de valeur stable adossé à des titres ou de tout autre produit virtuel offrant une exposition synthétique aux titres sous-jacents. Ces plateformes – que ce soit dans l’espace financier décentralisé ou centralisé – sont impliquées par les lois sur les valeurs mobilières et doivent fonctionner dans le cadre de notre régime de valeurs mobilières. » – Gary Gensler, président de la SEC

Les cryptomonnaies n’ont pas besoin de régulation mais de clarification

Ce sont donc plus d’une centaine de ces jetons impropres à la réglementation qui viennent de se voir expulser d’Uniswap. Avec en tête du cortège les offres du protocole Synthetix (SNX) qui coche toutes les cases du mauvais élève dans le domaine. Mais également les projets de type actions tokenisées et produits dérivés appliqués à l’univers des cryptomonnaies. Comme les options Opyn sur Ethereum, ou les systèmes de type Universal Market Access (UMA) qui permettent de créer des jetons synthétiques personnalisés capables de suivre le prix de pratiquement n’importe quoi.

Une liste qu’Uniswap Labs a rendue publique sur son site Internet. Et qui est présentée comme étant à l’origine d’une « très petite partie du volume global sur le protocole Uniswap ». Mais en fait, peu importe !

Il est interdit d’interdire

Car cette décision d’Uniswap Labs n’aura au final que très peu d’impact sur le fonctionnement même du protocole de la plateforme décentralisée Uniswap. Un constat exposé en toutes lettres dans sa publication officielle qui permet de mieux comprendre cette situation insolite. Car elle ne concerne que l’interface sous gestion de cette structure. Mais en aucun cas l’ensemble des smart contracts qui en gèrent le fonctionnement en toute indépendance. Et cela hors de tout contrôle, n’en déplaise à la SEC.

« Il est important de noter que le protocole Uniswap, contrairement à son interface, est un ensemble de smart contracts autonomes, décentralisés et immuables. Il offre un accès illimité à toute personne disposant d’une connexion Internet. De même, cette action n’a aucun impact sur le code de l’interface Uniswap, qui reste open source, ni sur les nombreux autres portails ou instances exécutées localement permettant d’accéder au protocole Uniswap. » – Uniswap Labs

Une prise de position historique qui pourrait donc rapidement devenir la norme dans le secteur de la DeFi. Et qui revient à obliger les structures en charge de la gestion des protocoles à jouer le jeu de la régulation. Mais sans avoir pour autant le pouvoir effectif de modifier ce même protocole, du fait de son caractère décentralisé et communautaire.

Ou comment répondre en apparence aux attentes de la SEC sans rien changer à ce qui se passe en réalité. Mais sans que ces activités « répréhensibles » ne puissent leur être reprochées par la suite. DeFi = 1 / SEC = 0 !


Cet article traite de l’actualité des cryptomonnaies. Il ne s’agit pas d’un conseil en placement financier. Toute prise de position doit s’accompagner de recherches personnelles et nécessite de croiser plusieurs sources avant de se lancer. DYOR !

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