Panorama CBDC 2020 : Du Bitcoin au DCEP chinois

26 décembre 2020 - 10:54

Temps de lecture : 3 minutes

Pour finir l’année, nous vous proposons de revenir sur cette frénésie de CBDC (Central Bank Digital Currency) qui a enfiévré presque tous les Etats et qui risque de modifier profondément notre usage de l’argent dans un futur qui s’avance à grand pas. Certes, le contexte sanitaire de 2020 a précipité la numérisation des paiements mais c’est bien évidemment l’intrusion, du moins considérée comme telle par nos dirigeants, du Bitcoin et des cryptomonnaies sans oublier le puissant détonateur Libra de Facebook qui a fini par sombrer – du moins dans sa version originelle- sous les coups de boutoirs des régulateurs mondiaux, qui a imprimé le mouvement vers une nécessaire modernisation des infrastructures bancaires. Nous allons donc revenir sur ce phénomène en plusieurs volets. Chacun d’entre eux tentant d’éclairer un aspect essentiel de ces désormais fameuses « cryptos » d’Etat.

Aux origines des CBDCs, le Bitcoin

On ne surprendra pas grand monde en faisant remonter l’origine des CDDCs à Bitcoin et à son éclosion suite à la crise ses subprimes en 2008. Pour être tout à fait précis, l’idée d’un cash numérique était déjà dans les cartons depuis bien plus longtemps, mais disons que pour des histoires de commodités qui n’excluent pas la simplification, le consensus la date du moment de la publication du livre blanc de Bitcoin,  « Bitcoin : un système de paiement électronique peer-to-peer » début 2009. En réponse à un système bancaire défaillant, Satoshi Nakamoto (individu ou collectif anonyme) propose une alternative pour stocker de la valeur et opérer des transactions en dehors de l’infrastructure traditionnelle et sans contrôle gouvernemental. Bitcoin depuis n’a cessé de gagner en popularité.

Mais les pouvoirs publics ont mis du temps à réagir. Rien de bien surprenant pour qui connaît le temps lent du régulateur qui, hormis un dénigrement systématique de cet « actif virtuel », n’a pas vu la menace puisqu’il ne concernait qu’un marché de niche. En revanche, l’irruption de Libra et de ses 2 milliards et demi d’utilisateurs potentiels a mis le feu aux poudres. On connaît la suite : branle-bas de combat chez les politiques et les responsables économiques et réflexion, puis tentative de conception dans la foulée de CBDC pour reprendre la main, en s’inspirant au passage de toutes les innovations technologiques apportées par Bitcoin. Chaque pays s’est donc mis à fomenter à son rythme un modèle de devise souveraine 2.0. Autrement dit, un habillage numérique pour une monnaie centralisée et régulée, connue dorénavant sous l’appellation de CBDC.

Chine et Suède

Toute l’année, nous vous avons informé des progrès réalisés par les banques centrales des petites et grandes économies pour mettre en oeuvre leurs monnaies numériques, autrement appelées MNBC (Monnaie Numérique de Banque Centrale), CBDC, ou DCEP à la mode pékinoise. La Chine justement qui, ce n’est plus un secret pour personne, sera probablement la première grande puissance à émettre sa monnaie d’Etat version numérique. Prévue pour être officiellement lancée au moment des Jeux Olympique de Pékin en 2022, le DCEP (Digital Currency Electronic Payment) connaît une phase prolongée et aiguisée de testing. Le yuan numérique semble déjà opérationnel et l’offensive de séduction du pouvoir central, notamment par le biais d’une distribution gratuite, pour l’imposer à sa population a déjà commencé.

Alors la CBDC, instrument privilégié d’un régime autoritaire ? Peut-être, mais pas exclusivement. Ainsi, l’une des nations les plus à la pointe en la matière est précisément à l’autre extrême de l’échiquier politique. Il s’agit de la Suède, une démocratie dite avancée, qui pourrait commencer à émettre sa e-couronne dès 2022. Rien d’étonnant, la nation scandinave est le premier pays au monde où l’usage des espèces est devenu presque obsolète. Le passage devrait donc s’opérer en douceur avec une population déjà massivement convertie au paiement électronique et qui témoigne en plus d’un lien de confiance à l’égard de sa classe dirigeante.

Consentement citoyen et disparition programmée du cash

Un paramètre qui est loin d’être négligeable. Ce n’est pas pour rien si la banque centrale européenne a lancé une vaste consultation citoyenne sur un possible euro numérique. Pour mener à bien un tel projet, il faut effectivement, dans des régimes démocratiques, obtenir le consentement éclairé des populations concernées. Dans le cas contraire, c’est le flop assuré. Aussi, la plupart des pays engagés dans la course aux CBDCs agissent-ils de façon très progressive et garantisse le fait que l’apparition d’une monnaie numérique d’Etat coexistera avec les autres formes de paiement en vigueur. Elle ne sera pas censée notamment faire disparaître le cash…

On veut bien les croire, au moins à court terme, car on sait bien que le voeu secret de nos dirigeants est au contraire d’abolir cet outil monétaire chargé de tous les maux (blanchiment d’argent, fraude fiscale… et surtout moyen pour les citoyens d’échapper à la surveillance de l’Etat). De ce point de vue, le contexte sanitaire de 2020 les aura bien aidés. Voilà en effet que l’argent est devenu sale pour beaucoup de monde. De fait, le cash délaissé comme choix de règlement (mais pas comme matelas de protection) a profité aux formes électroniques de paiement. Et cette croissance a ouvert un boulevard à la mise en oeuvre de CBDC comme nous allons continuer de l’observer dans la suite de nos épisodes.

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